mardi 13 juin 2017

Valet de pique de Joyce Carol Oates


Éditions Philippe Rey
traduit de l'anglais (États-Unis) par Claude Seban
✦✦✦✦✧ (J'ai beaucoup aimé)

Andrew J.Rush, 53 ans, est fier de lui : écrivain reconnu et adulé, on peut dire qu'il est heureux ! Auprès de sa femme Irina, il mène une petite vie tranquille dans sa belle maison du New Jersey où il peut écrire ses « romans à énigmes et à suspense, pimentés d'une touche de macabre qui se vendent bien » en admirant un paysage absolument magnifique. Rien de choquant dans ses romans, non, ce n'est pas son genre. « Jamais d'obscénité ni même de sexisme. » Des romans qui se terminent bien : les méchants sont punis comme il se doit. La moralité est sauve ! Il est d'ailleurs surnommé le « Stephen King du gentleman ».
Mais comme vous le savez, les êtres sont complexes et Andrew, derrière ses allures de romancier « propre sur lui », écrit d'autres textes nettement moins recommandables qu'il publie sous un pseudo « Le valet de pique » et ces textes pourraient aller jusqu'à inspirer dégoût et répulsion à certains lecteurs… Tout se passe comme si notre Andrew était un être double, une espèce de Docteur Jekyll et Mister Hyde de la littérature, qui se laisserait aller à tous ses plus bas instincts, à l'immoralité la plus totale et au Mal avec une majuscule lorsqu'il se livre à la rédaction de ses romans signés « Le valet de pique » .
D'ailleurs, ce sont des romans qu'il écrit la nuit dans un état quasi hypnotique et souvent sous l'emprise de l'alcool. Tandis qu'il peine à écrire sous son vrai nom, il remplit de façon frénétique dans un élan d'exaltation intense voire de démence fébrile un nombre incalculable de feuillets sous son pseudo diabolique. Bien sûr, aucun des membres de sa famille n'est au courant de sa double vie, de cette part de ténèbres qui s'épanouit en lui et c'est peut-être mieux car ils découvriraient un homme pas forcément recommandable, même si, se rassure Andrew, il ne lui viendrait jamais à l'idée de faire du mal à quelqu'un, non, ce n'est vraiment pas son genre ! Et pourtant, de plus en plus souvent, une petite voix (son double ? son inconscient?) lui chuchote des choses pas terribles à l'oreille notamment depuis qu'une voisine un peu folle a déposé plainte contre lui, l'accusant de vol et de plagiat ! De vol, lui ? Il ne connaît même pas cette voisine. Alors la petite voix lui dit qu'il ne faut pas se laisser embêter comme cela, qu' il faut se débarrasser des gêneurs. Il faut être tranquille pour écrire, non ? Mais, les problèmes ne s'arrêtent pas là : la propre fille d'Andrew découvre en lisant un roman signé « Le valet de pique » des références à la vie de sa propre famille ! Elle en est indignée et avertit au plus vite son père. Décidément, Andrew est de plus en plus dérangé dans son travail… Il va falloir remédier à cela, lui suggère son double qui prend, il faut bien le dire, de plus en plus de place dans la vie du romancier !
Tout de suite, deux aveux : c'est mon premier Joyce Carol Oates. Je savais que c'était un bon auteur mais voilà, la rencontre n'avait pas eu lieu ! Deuxième aveu : je n'ai jamais lu un livre de Stephen King que J. C. Oates semble beaucoup apprécier et je compte bien me rattraper dès cet été !
Alors, que dire de Valet de pique ? J'ai beaucoup aimé ce roman et l'ai lu d'une traite, happée par le suspense, inquiète pour le pauvre Andrew de plus en plus dépassé par la situation.

L'écriture est fluide et très agréable. Un bon thriller psychologique qui parle d'écrivain, de littérature, de création, de double ne pouvait que me séduire ! C'est fait !

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