Éditions Viviane Hamy
★★★★☆ (J'ai beaucoup aimé)
Mon
premier Cécile Coulon, Prix des Libraires 2017, waouh, belle
référence ! Généralement, j'aime beaucoup les livres
récompensés par ce prix, des valeurs sûres que je lis chaque
année.
Alors…
Incontestablement,
Cécile Coulon a du talent, une écriture, un style. Son récit est
puissant, décidé, abrupt, tranché. Il a en lui de l'énergie, de
la vigueur, une forme de violence aussi. Cela dit, on frôle parfois
une certaine froideur dans la présentation des lieux mais aussi dans
celle des personnages : on ne s'y attache pas, on les voit de
loin, comme des petites marionnettes manipulées par le destin...
C'est cette « distance » qui m'a peut-être un peu gênée
au départ, ce côté « détaché » de l'écriture, sans
émotion, qui, cependant, à y bien réfléchir, sert parfaitement le
propos : les personnages, comme les lieux évoqués, gardent
leur part de mystère, préférant confier au silence leur
sentiments, leurs craintes, leurs obsessions et leurs passions.
Comme
dans une tragédie, on sait à l'avance que tout va mal se terminer
ou à peu près : le village nommé « Les Fontaines »
est dominé par un massif effrayant « les Trois-Gueules »,
« un défilé de roche grise, haute et acérée, divisé en
trois parties, en trois sommets successifs qui ressemblent à s'y
méprendre à trois énormes canines. » Une menace semble
planer créant une tension dramatique plus présente dans la seconde
partie du récit. Difficile de savoir quelle forme le mal prendra
mais la bête est là, prête à bondir...
Après
la Seconde Guerre Mondiale, l'entreprise d'extraction de minerai
Charrier Frères s'est implantée dans ce lieu où la pierre est
d'une qualité exceptionnelle. Les ouvriers au visage blanc de
poussière sont surnommés « les fourmis blanches ». Ils
s'installent au village et grossissent les rangs des quelques
agriculteurs natifs du pays. Les cent cinquante habitants passent
rapidement à mille. Pourtant, cette nature effrayante fait peur aux
gens de la ville : elle noie, brûle, asphyxie, tue, elle est
magique et sublime, hostile et superbe, un paradis mêlé d'enfer ou
bien l'inverse. Certains hommes de la ville disent « qu'il
ne faut pas aimer la vie pour vivre aux Trois-Gueules . »
C'est
là, qu'un médecin originaire de Lyon, André, vient s'installer
dans une maison somptueuse « La Cabane » qui domine le
village. Il y passera sa vie. Bien sûr, il connaît les histoires
effrayantes qui planent sur ces terres de légendes et de
superstitions d'un autre âge, refusant de trop y croire, et
pourtant…
Trois
saisons d'orage est l'histoire
d'André, de son fils Benedict qui deviendra lui aussi médecin, de
sa belle-fille Agnès et de la fille qu'ils auront Bérangère ;
c'est aussi l'histoire de Valère, fils de paysans, de natifs de la
région, de gens qui ne sont pas nés en ville, qui sont d'ici.
Un
récit tragique raconté par Clément, un homme d'église qui n'a pas
d'histoires à lui mais qui connaît celles des autres, les secrets,
les mystères, qui observe, écoute et sait se taire car toutes les
vérités ne sont pas faciles à entendre.
Encore
une fois, un texte au premier abord à l'image des lieux et des gens
dont il parle, austère, un peu froid, comme distant et qui, au fur
et à mesure de la lecture, s'ouvre, se révèle dans toute sa
splendeur, sa beauté et sa puissance.
Une
très belle lecture que l'on n'oublie pas !
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