mercredi 30 janvier 2019

Saltimbanques de François Pieretti


Éditions Viviane Hamy
★★★☆☆ (J'ai bien aimé)


Nathan a quitté assez jeune le domicile de ses parents : il a voulu mener sa vie, ailleurs, loin d'eux. Après quelques années d'études, il ne fait que vivoter en exerçant des petits boulots alimentaires qui ne l'intéressent pas vraiment. Ses retours au pays ont été assez rares et le temps est passé.
Ainsi, Nathan n'a-t-il pour ainsi dire pas connu son frère, Gabriel. La seule image dont il se souvienne est celle d'un ado distant, de quinze/seize ans, avec lequel il n'a jamais vraiment parlé. Gabriel fréquentait déjà, à l'époque, une troupe de saltimbanques avec laquelle il faisait des spectacles. Nathan n'en a vu aucun et maintenant, c'est trop tard puisque Gabriel est mort dans un accident de voiture peu de temps après avoir passé ses épreuves du bac.
Nathan est donc revenu pour les obsèques de son frère. S'il sait bien qu'il ne pourra jamais rattraper le temps perdu, il va tout de même tenter de comprendre qui était ce frère, cet étranger. Encore lui faudra-t-il poser les bonnes questions… Pas si simple...
Ce sont d'abord des parents terrassés par la douleur qu'il retrouve. Commence alors une errance autour de ce frère disparu : aller sur les lieux qui étaient les siens, rencontrer ceux qui l'ont connu et comprendre ce qui l'a amené à prendre cette voiture sous l'emprise d'alcool ou de stupéfiants.
Saltimbanques est un roman d'atmosphère : les personnages semblent évoluer dans un monde qui n'est pas vraiment le leur et dans lequel ils ont du mal à trouver leur place, comme s'ils avançaient constamment dans une semi-obscurité les privant de repères. Rien dans ce monde ne semble les retenir, les intéresser, les impliquer. Ils sont de passage, songent peu à l'avenir et vivotent au jour le jour dans une brume qui semble pénétrer leur âme. « Est-ce qu'il y a seulement une histoire ? Une vraie histoire ? » s'interroge Bastien, un ami. Est-ce que ces jeunes parviennent à se construire une vie ? À être heureux ? Pas sûr.
Qui sont-ils, ces jeunes ? Pourquoi cette désillusion permanente, cette fuite constante, cette tristesse insondable qui imprègne tout leur être ? Une très grande mélancolie émane de chacune de ces pages disant l'impossibilité d'être heureux, le malaise d'un désenchantement permanent dans un monde silencieux et triste.
François Pieretti, primo-romancier, a su rendre ce sentiment presque d'abandon que peuvent ressentir des jeunes sans avenir, « des enfants perdus », abandonnés même, trouvant encore peut-être dans l'amitié quelque refuge possible.
Comme je le disais, Saltimbanques est un roman d'atmosphère qui a su capter l'air du temps. L'écriture est fluide et tout en nuances. J'avoue cependant avoir peut-être moins aimé la dernière partie qui se passe en Bretagne et qui m'a semblé plus convenue (la Bretagne est tellement « cliché » : c'est le lieu où, dans la littérature actuelle, échouent tous les jeunes bobos qui veulent recommencer leur vie…) Par ailleurs, je la ressens comme se rattachant un peu artificiellement à un récit formant un tout. C'est un point de vue, il se discute bien entendu !
Des premiers pas très prometteurs en littérature, c'est certain ! Un auteur à suivre, assurément !

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