Éditions Le Tripode
★★★★☆ (c'est Baptiste qui va être content!)
Seul,
invisible aux yeux des autres et profondément déprimé : voilà
comment se sent le bien mélancolique Baptiste Roy, un pauvre et
misérable écrivain dont personne ne lit le tout dernier roman :
Entrée dans l'hiver. Trente fois par jour, il consulte
avec un peu d'espoir le classement des ventes sur Amazone : mais
son texte occupe la 475 758e place, ce qui signifie que
475 757 livres autres que son roman ont été commandés avant le
sien. « Un demi-million pratiquement. Les gens avaient
préféré se procurer « Enseigner l'éducation physique à nos
enfants », un manuel écrit en 1907 par l'abbé François
Calot, classé 475 612e, ou « Je suis
gugusse, voilà ma gloire », les souvenirs de Micheline Dax,
publiés en 1989, classés 474 909e »
Seule sa mère a eu l'extrême gentillesse de lui laisser un commentaire client... sans même penser à s'inventer un pseudo, il est vrai ! Pas plus enthousiaste que ça, Nicole n'a mis que 3 étoiles. « C'est très bien, 3 étoiles ! 5, c'est pour les grands chefs-d'oeuvre. Pour Joyce, Virginia Woolf... »
Ben oui, évidemment…
Seule sa mère a eu l'extrême gentillesse de lui laisser un commentaire client... sans même penser à s'inventer un pseudo, il est vrai ! Pas plus enthousiaste que ça, Nicole n'a mis que 3 étoiles. « C'est très bien, 3 étoiles ! 5, c'est pour les grands chefs-d'oeuvre. Pour Joyce, Virginia Woolf... »
Ben oui, évidemment…
Baptiste
aurait dû écouter les conseils de son éditrice : « Un
feel good, voilà ce que tu devrais écrire. Tu le ponds en un mois,
tu prends un pseudo, on lui donne un titre à la con, du genre « Il
ne faut jamais perdre espoir »- plus c'est gros, plus ça
passe- on le sort pour l'été et on en vend 30 000. Ça
fera du bien à tout le monde. »
Son
histoire d'appartement vide et de famille déportée… ça plombe...
Ah
oui, encore une chose : la femme de Baptiste s'est barrée avec
Gérard Habib, son dentiste. « Elle partageait
la vie d'un romancier sur le point de publier son troisième opus et
s'était entichée d'un type qui faisait des détartrages, arrachait
des chicots pourris et, à longueur de journée, disait des choses
comme « Essayez de manger du côté gauche à midi » ou
« Les implants, c'est mal remboursé en général. » »
Il vit dorénavant en survêt molletonné Domyos, ne se brosse plus
les dents ni le reste…. Quant aux cinq fruits et légumes par
jour….
Sur
ce , « Mme Halberstadt a sonné à la porte. » Mme
Halberstadt et... son chien, un carlin…
Vous
voyez ce que c'est, un carlin ? Des « yeux sortant
légèrement de leur orbite, un bout de langue à l'air libre, des
pattes ridicules, une absence de cou. Il n'y avait rien de normal
chez cet animal, tout en lui était trop gros ou trop petit. Sa
respiration, courte et très sonore, était celle d'un être chétif,
modifié, qui manquait d'oxygène. Même sa couleur semblait hésiter
entre le sable, la farine et la cendre. » Ah, ça y est,
vous voyez…. Et comme sa chère voisine doit se faire opérer de la
cataracte, elle lui propose de garder la bestiole qui ne fait que des
« crottes toutes petites et très dures. »
Il
ne manquait plus que ça : une tuile de plus ! Un chien !
Que faire de ce fardeau ? L'abandonner ? Le laisser crever
de faim ? Le donner à sa mère ? En attendant,
Croquette/Courgette va devoir partager la vie bien sombre de notre
quadra qui s'enfonce dans la plus noire des déprimes….
Et...
si Croquette/Courgette allait lui changer la vie ? Parfois, il
ne faut pas grand-chose pour que tout aille soudain un peu mieux…
Allez,
disons-le, je ne suis pas une fanatique des feel good, ça me
déprime… Mais quand c'est écrit par Stéphane Carlier, c'est
franchement très drôle ! Quel sens de la formule, quel regard
juste et décapant sur notre société, quel humour… Je
me suis régalée avec ce petit livre piquant, décapant, désespéré,
tendre et beau à la fois qui m'a beaucoup, beaucoup fait rire…
Ir-ré-sis-ti-ble…
Une
vraie sucrerie… Et c'est pas Croquette/Courgette qui me
contredira...
Moi
je dis que vous auriez tort de vous en priver !
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