Il avait lu Bouvier, il avait adoré, il était parti. Où ça ? En Iran ! Non ? Si ! Mais il est complètement cinglé ! Il est jeune.
Alors là franchement, moi, la trouillarde qui rêve de traverser le monde, j’ai lu ce texte complètement éberluée par la candeur, l’insouciance, l’irresponsabilité de ce jeune gars aux allures de dandy, traversant un territoire où tu as quasiment cent pour cent de risques de te faire arrêter, mettre en taule et de ne jamais revoir le jour (il part fin 2022, donc peu de temps après la mort de Mahsa Amini!)… Ben, lui, pas de problème, il y va, discute avec les uns, les autres, fait des photos, des vidéos (bon d’accord, il les envoie aux copains français et les supprime sur son portable mais pas toujours à temps...), rencontre une multitude d’opposants au régime (faut dire, c’est à peu près la totalité de la population.) C’est incroyable. Quel courage quand même ! J’ai lu ce texte en tremblant pour lui. Et dire qu’il a vu des paysages qu’on ne verra certainement jamais. Un peu comme ces grands voyageurs du XVIe siècle qui décrivaient des terres que personne ne connaîtrait. Des lieux somptueux. Je passais mon temps à aller voir sur Google Map à quoi ressemblaient des villes comme Ispahan (ce nom me fait rêver), Keshit ou Kashan… Je me suis fait mon petit voyage moi aussi… Bien tranquille dans mon lit, j’ai traversé le désert (oh l’évocation de ce routard paumé en plein désert sans une goutte d’eau…), j’ai été éblouie par le bleu des mosaïques d’Ispahan, j’ai traîné la nuit dans les rues vides de Yazd… Mais surtout, surtout, à travers le récit de Désérable, j’ai découvert des gens, des gens courageux, prêts à mourir pour la liberté : c’est Firouzeh qui crie « Femme, Vie, Liberté ! », « A bas le dictateur ! », « Khamenei assassin ! », c’est toujours Firouzeh qui apprend des poèmes au cas où elle serait arrêtée et privée de tout. Au moins, elle aurait ses poèmes et personne ne pourrait les lui enlever. Ce sont ces femmes qui laissent flotter leurs cheveux au vent tout en sachant ce qu’elles risquent. Sur Internet, je suis allée voir Khodanur Lojei danser. Comme il est beau quand il danse… Et bien sûr, Mahsa Amini, dans tous les esprits, dans tous les coeurs… Je me souviendrai toujours du cri de Niloofar dans la nuit de Téhéran : « Mort au dictateur » et de l’écho, ce bel écho qui traverse la ville. Et toutes ces voix qui n’en peuvent plus de vivre cette terrible dictature où l’on n’hésite pas à tirer sur la foule pour faire taire ceux qui veulent parler.
Et notre François-Henri, qui sans jamais se départir de son humour (bon je sais bien, il l’a écrit après, le bouquin, mais quand même ) (la fin du récit est complètement sidérante…) va d’une ville à l’autre en bus, en stop, en train, regarde, écoute, analyse… Tel un Candide des temps modernes, il s’étonne, pose des questions, se documente, raconte. Il n’est pas un spécialiste de l’Iran et c’est tant mieux. On apprend avec lui, il nous embarque comme un copain avec qui on se marre bien (c’est vrai, il a toujours le mot pour rire même dans les pires situations et un immense sens de l’observation...)
Bon, il est revenu, c’est le principal (je parle comme si j’étais sa mère !) et il nous offre là un texte incroyable, tellement riche ! Un vrai voyage ! J’ai vraiment l’impression d’avoir découvert un pays et son peuple… Surtout, ne vous en privez pas !
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