dimanche 31 janvier 2016

Le Voyage de M.de Balzac à Turin de Max Genève


Saviez-vous qu’au mois de juillet 1836, Balzac quittait Paris en calèche pour se rendre à Turin avec une jeune femme déguisée en page ?
Cet épisode pour le moins romanesque est le sujet du dernier livre de Max Genève : Le Voyage de M. de Balzac à Turin.
Non, cette jeune femme n’est pas George Sand, elle s’appelle Marcel, de son vrai nom Caroline Marbouty, elle est mariée, a deux enfants et elle écrit à une époque où les publications des femmes sont rares.
En décembre 1835, Balzac directeur de La Chronique de Paris  avait commandé une nouvelle qu’elle avait signée Marcel. Il lui en demandera d’autres et en lui proposant cette petite escapade, il espère obtenir davantage encore de cette jolie jeune femme. Seulement, Balzac est prudent, il ne veut pas que le grand amour de sa vie Mme Hanska, ainsi que ses autres maîtresses parisiennes Mme de Berny et Mme Guidoboni-Visconti apprennent qu’il voyage avec une jolie jeune femme, d’où ce déguisement qui, en réalité, ne trompe personne.
 Ce voyage tombe à pic ! Balzac croule sous les dettes: son journal fait faillite; sans cet appui, ses vues politiques n’ont aucune chance de se concrétiser, le Lys dans la vallée se vend mal, et l’écriture de ses romans l’a épuisé.                       
Par chance, ses amis, les Guidoboni-Visconti lui demandent de les représenter à Turin pour une affaire de succession un peu compliquée : le romancier a quelques notions de droit, cela fera l’affaire !
Et nous voilà partis sur les routes avec Balzac et son petit page : Chambéry, la Grande Chartreuse, le Mont-Cenis, Turin. Les visites de la ville le long du Pô, dans les petites ruelles bien fraîches où flotte l’odeur des figuiers et des lauriers sont délicieuses. On pénètre dans les jardins de l’avocat Luigi Colla à Rivoli, on grimpe jusqu’à l’église Santa Maria del Monte dei Cappucini et l’on chevauche jusqu’à Superga pour découvrir les tombeaux des princes de Savoie. Les soirées, dans les belles villas aristocratiques, où Balzac est reçu en invité de marque, ont tout autant de charme…
C’est sans conteste un périple très documenté, agréable pour le lecteur qui découvre la ville aux côtés d’un Balzac devenu compagnon de voyage. Parenthèse peu connue de la vie de l’écrivain qui n’est pas représenté comme on a l’habitude de le voir : penché sur sa table de travail, même si cela finit par lui manquer. Quel homme !
J’avoue que j’aurais tout de même aimé en savoir plus sur cette femme, « Marcel », qui demeure trop souvent au second plan : qui était-elle vraiment ? Comment a-t-elle vécu cette aventure dans sa vie ? L’épilogue se recentre sur elle mais le mystère demeure… finalement, elle reste dans l’ombre du génie… 

samedi 30 janvier 2016

La logique de l'amanite de Catherine Dousteyssier-Khoze


Je n’aurais pas forcément aimé partager une soupe de poudre de carcasses d’écrevisses finement broyées avec Monsieur Nikonor Pierre de la Charlanne -et pour cause- mais ses mémoires dans lesquels il avoue son amour pour les champignons, la littérature et les fromages et évoque en quelques lignes son enfance, sa famille dans son château de la Charlanne, en Corrèze, ses mémoires, dis-je, m’ont franchement beaucoup amusée !
Qui est ce vieux monsieur ? C’est bien là le mystère ! Et ne comptez pas sur moi pour que je vous en dise plus, je me ferais disputer par ma mère qui a horreur que j’en révèle trop ! Alors, quelques indices seulement, si vous êtes sages !
Notre Nikonor (ça existe un prénom pareil ?) brûle les derniers jours de sa vie : « Pour des raisons qui deviendront claires beaucoup plus tard, j’entreprends de rédiger un volume de mémoires, comme disent les Anglais. Nous sommes le 1er février, j’ai probablement quelques semaines de répit devant moi avant d’être rattrapé par les événements. »
Fils d’un gentleman-farmer aisé, corrézien de souche et « spécialiste éminent du coprin chevelu » et d’une mère anglaise à « la fibre slave », il voue une haine farouche à sa sœur jumelle Anastasie, haine dont vous découvrirez bientôt la désopilante origine.
Evidemment, quelques précepteurs érudits se sont succédé pour se charger de l’éducation des enfants mais ils ont quitté la place bien rapidement… on comprend pourquoi…
Ce n’est pas le coprin chevelu (sacré nom ça aussi !) qui fascine notre Nikonor mais le cèpe « Graal de la forêt » et les amanites, à la fois pour des raisons esthétiques et, dirons-nous, pratiques…
Il regrette d’ailleurs que l’on ne trouve aucune mention des dits champignons dans l’œuvre de Chateaubriand : « Ayant affectionné tout particulièrement l’automne, il a dû rencontrer, à un moment donné, un bolet ou un tapis de trompettes-de-la-mort. Il aurait pu faire un effort descriptif, la littérature ne s’en porterait pas plus mal aujourd’hui. A la réflexion, je suis prêt à parier, distrait rêveur mélancolique qu’il était, qu’il a dû en écraser pas mal (je parle surtout de cèpes), ce qui jette une lumière plus nuancée, voire controversée, sur François-René de Chateaubriand et le mouvement romantique en général. »
D’ailleurs, Nikonor aurait aimé rédiger un essai sur Le Cèpe dans la littérature et les arts visuels : Esthétique(s) de l’absence.
Son activité préférée consiste donc à «  aller chercher des cèpes dans une belle forêt, moussue de préférence. » J’en vois déjà qui revivent en lisant ces mots….
Gare à ceux qui oseraient s’aventurer sur son domaine un petit panier à la main !
Humour noir très british garanti… plus une bonne dose de loufoque et de délire verbal… Le tout écrit dans un style perfect.
 A frémir de rire et à  consommer sans modération… quoique…



A François, grand mycologue devant l’Eternel, qui trouvait que mes critiques manquaient un peu de champignons… Il sera servi !

mercredi 27 janvier 2016

L'Ombre de nos nuits de Gaëlle Josse


Quel début d’année ! Je n’en reviens pas. Les textes que je découvre, quoique portant sur des sujets bien différents, me touchent chacun de leur façon. Pourvu que ça dure !
Je le dis tout de suite, de Gaëlle Josse, je n’ai pas lu Le dernier gardien d’Ellis Island qui a eu beaucoup de succès mais je peux vous assurer que ça ne va pas tarder !
 Au début du livre, l’éditeur précise que l’auteur est venu à l’écriture par la poésie. Je crois en effet que Gaëlle Josse pourrait bien nous parler de n’importe quoi, nous nous laisserions porter par sa prose si nuancée, si douce, si poétique. La délicatesse faite écriture. Une prose qui apaise et qui soigne…
Dans L’Ombre de nos nuits, deux histoires s’entremêlent : celle d’un peintre, Georges de la Tour, en son atelier de Lunéville, au début de l’année 1639. Dans le clair-obscur de la pièce, il prépare sa toile et éprouve un « vertige… devant cette surface vierge. Tout y est possible. » Son petit apprenti Laurent l’observe et commente chacun de ses gestes. Il fait bon dans l’atelier, les regards se croisent et se taisent. Chacun contemple ce « Maître qui sait peindre le silence. » Il sait que sa fille Claude prêtera son visage à Irène, la jeune femme penchée sur Saint Sébastien et qui tente de lui enlever une flèche fichée dans la cuisse. Marthe, la fille de la servante, sera celle qui se dissimule le visage au second plan. Il faut se mettre au travail car le peintre destine son œuvre au roi, Louis XIII.
Puis, changement d’époque : nous sommes à Rouen, au printemps 2014 : une jeune femme est face à la toile peinte par De La Tour : « Saint Sébastien soigné par Irène », dans un musée de Rouen. Elle aussi a aimé et essayé de soulager, de soigner celui qui souffrait. Elle se perd dans la contemplation de ce tableau qui la renvoie à ce passé, encore là, si près, et dont elle panse encore les plaies.
Lumières, lumières de quelques moments heureux, intenses, miraculés où l’on a fait don de soi, de son amour : « Donne toujours plus que tu ne peux reprendre. Et oublie. Telle est la voie sacrée », ce sont les mots de René Char, cités en exergue. Don du peintre qui donne de soi pour insuffler la vie aux personnages sur la toile, don de sa fille Claude qui doit penser, comme le lui demande son père, à ce qu’elle aime le plus au monde lorsqu’elle pose, don de Laurent, le petit apprenti orphelin, qui s’est offert secrètement à Claude et se livrera corps et âme à la peinture, don de la narratrice qui s’est perdue en l’homme qu’elle aimait.
Ombres, ombres de la guerre, celle de Trente ans, qui n’en finit pas, de la peste, en cette année 1639, désolation de voir ce fils aimé qui ne saura jamais peindre, ombres d’un nom que l’on entend prononcer et qui est celui de l’autre, celle dont l’ombre plane.
« De l’obscurité émerge une étrange vérité, celle de nos cœurs. » constate le peintre.
Peut-être a-t-on besoin de l’ombre de nos nuits pour survivre à la lumière, s’élancer dans le jour qui nous appelle et « Reprendre la route ». 

mardi 26 janvier 2016

Celle que vous croyez de Camille Laurens


Il est de certains livres dont on sait, à l'avance, qu'ils vont nous plaire: les sonorités d'un nom peut-être, un titre qui semble vous faire signe, que sais-je... 
En tout cas, je ne me suis pas trompée et je vous promets que lorsque vous aurez parcouru les premières pages de ce livre, le vertige vous prendra car c'est un roman qui vous fait longer un précipice, le précipice des apparences et des faux-semblants.
Lisons tout d'abord la quatrième de couverture: " Vous vous appelez Claire, vous avez quarante-huit ans..." Qui? Moi? La lectrice? Ou quelqu'un d'autre? L'auteur? Un personnage? Des personnages peut-être...? Nous sommes ici au coeur du sujet: l'identité et la question de savoir ce qui nous fait exister aux yeux des autres.
Claire, la narratrice, celle qui a 48 ans, est maître de conférence en littérature comparée. Un peu le genre de personne "qui se demande comment on peut vivre sans avoir lu Proust." Elle est divorcée, a deux enfants et un amant Jo. Or, pour surveiller son amant volage, elle a l'idée de se créer un faux profil Facebook afin d'entrer en contact avec l'ami de l'amant, Chris. 
Ça va, vous me suivez? Tenez-vous bien car c'est beaucoup plus complexe que cela!
 Elle veut, en effet, pouvoir discrètement prendre des nouvelles de son amant, Jo, par l'intermédiaire de Chris, le copain, qu'elle ne connaît pas. Mais, à force d'échanger avec l'ami de l'amant, elle finit par tomber amoureuse... de lui, de celui qu'elle n'a jamais vu et qui pense qu'elle est une belle brune de vingt-quatre ans, célibataire et passionnée de photo! La manipulatrice est prise à son propre piège, le piège de la toile, sans mauvais jeu de mots.   
Mais, allons plus loin encore: et si Claire finissait par être la femme qu'elle s'est créée sur Facebook, pas un double, une autre. Celle qui lui permet encore de séduire, d'attirer, d'exister et d'oublier celle sur qui on ne se retourne plus, celle qui "porte plainte, qui signale sa disparition... car disparaître de son vivant reste une épreuve." Et pourquoi ne la voit-on plus, me direz-vous? Parce qu'elle n'a plus vingt ans: "Hier fantasme, aujourd'hui fantôme." Triste sort que celui de la femme qui vieillit, qui veut jouer encore mais qu'on ne voit plus, qui n'existe plus: "Le problème dans le jeu de cache cache, c'est quand vous restez cachée sans que personne s'en aperçoive." Alors, Claire se "coule dans son personnage avec l'aisance des comédiens." Elle joue, se compose un rôle. Et puis, la voix, c'est important, mais est-ce suffisant? Il faut donc prendre une décision: dire qui on est vraiment. Après tout, l'aspect physique a-t-il tant d'importance? Ou bien, ne pas prendre de risques, s'effacer, se retirer, désactiver son compte et disparaître, quitter la fiction que l'on s'est créée et remettre les pieds sur terre, dans le réel. Et ce peut-être violent, à moins que l'on imagine des échappatoires, par l'écriture, la fiction. Alors, on peut inventer, s'inventer des vies, s'appeler Claire, Camille ou bien Katia...
Comme le dit Virginia Woolf citée p 140: "...il ne s'est rien passé tant qu'on ne l'a pas écrit." Heureusement, il nous reste encore cela...

dimanche 24 janvier 2016

Titus n'aimait pas Bérénice de Nathalie Azoulai


 Ah ! Ce titre ! Comment peut-on se permettre d’affirmer cela ? Est-ce possible ? Quelques vers me reviennent soudain à l’esprit : « Je sens bien que sans vous je ne saurais plus vivre, / Que mon cœur de moi-même est prêt à s’éloigner ; / Mais il ne s’agit plus de vivre, il faut régner. » 
Bon, alors, pourquoi ce titre ?
Commençons par le commencement : nous sommes dans un café. Un Titus, non, non, pas l’Empereur de Rome, un Titus X , moderne, quitte une Bérénice qui est peut-être prof de français dans un petit collège mais certainement pas Reine de Palestine, au premier siècle après JC. « Ça s’fait pas » diraient certains. Oui, mais, notre Titus est marié à Roma, il a des enfants et le sens des responsabilités : il préfère sauver son couple plutôt que de vivre sa passion. Rare par les temps qui courent. Bon, voilà notre Bérénice détruite, anéantie par un chagrin qui la ronge un peu plus profondément chaque jour. Et ce ne sont pas les paroles plates comme des trottoirs de rue qui vont la rétablir : « Tu en sortiras plus forte » -Ah, oui et en attendant je fais comment pour vivre ?- « Un jour, tu ne te souviendras que des bons moments » - lesquels déjà ?
Donc, notre Bérénice décide de « quitter son temps, son époque, construire un objet alternatif à son chagrin, sculpter une forme à travers son rideau de larmes. » Hum, c’est bien dit…. Et concrètement ? , vous entends-je murmurer… En se perdant dans Racine, en cherchant à l’approcher au plus près. Elle « veut y toucher, y mettre les mains ». Elle pense que si elle est capable de comprendre comment un homme « a pu écrire des vers aussi poignants sur l’amour des femmes, alors elle comprendra pourquoi Titus l’a quittée ». Ah. Je ne suis pas forcément très logique mais je ne vois pas comment ceci va expliquer cela, mais bon, allons-y.
Et effectivement, le grand voyage a lieu et c’est précisément là qu’opère la magie du livre : on pénètre dans le vallon, Port-Royal des Champs. Le petit Jean travaille auprès de ses maîtres jansénistes: « Pallida morte futura » : « Pâle à cause de la mort qui s’approche, dit-un élève. Non, dit le maître. Pâle d’une mort prochaine, propose Jean. Mais cela ne veut rien dire ! On n’est pas pâle de quelque chose » s’insurge son condisciple.  Et pourtant, on y est, on touche à la beauté. Racine fouille les Anciens, les décortique, les imite, les apprend par cœur, les traduit, inlassablement. « Ibant obscuri sola sub nocte per umbram » : « Ils avançaient à travers l’ombre, obscurs dans la nuit solitaire » propose le maître. « Ils allaient obscurs dans la nuit seule » corrige Racine. Il vit d’hypotypose, de grammaire (c’était vraiment une autre époque !) se passionne pour la concision du latin, la mélodie des mots, la structure des phrases. On le sent tâtonner, chercher. Les mots sont chair, il s’en nourrit. Le lecteur est plongé dans le clair-obscur et le silence de Port Royal. Seul  le chant des moniales traverse parfois les murs épais.
Puis, c’est le départ pour Paris et l’envolée : sa vie de courtisan, sa carrière de dramaturge, ses rencontres : les frères Corneille qu’il faut surpasser, un Molière déjà bien fatigué, un La Fontaine qui aime deviser le temps d’une promenade. « De cette nation, il sera la langue » a-t-il décidé ! Il travaille, passe d’un genre à l’autre. « Alors c’est donc vrai que vous avez choisi la poésie contre Dieu ? » lui reproche amèrement sa tante, de Port Royal. Il est écartelé, déchiré par ces deux lieux qui se haïssent : le rigueur, l’austérité, le dénuement contre l’éclat, le faste, les passions. Sa fascination pour Louis XIV le porte. La Thébaïde, Andromaque, Britannicus, Bérénice… les représentations se succèdent, il connaît l’amour de la Du Parc, son actrice…. Et l’on suit ce parcours fulgurant dont je tais bien des tourments….
Les mots de Nathalie Azoulai nous entraînent : « J’ai subi une immersion malgré moi et ma langue s’est imprégnée de son tempo. Il y a une élégie qui traverse mon roman, que j’ai sentie sans la contrôler. » Il y a aussi certainement une intimité entre l’écrivain et son sujet, et le monument de la littérature française que l’on imaginait telle une statue de marbre devient chair, souffle, prend vie. 
Louis XIV disait à Racine : « Quand on sort d’une de vos pièces, immanquablement, on est sous alexandrins ». On pourrait dire la même chose du livre de Nathalie Azoulai et finalement, ce sont bien des mots dont on a besoin pour oublier nos chagrins d’amour….



Merci à Claude pour cette plongée dans le silence studieux de Port- Royal et les divertissements lumineux de Versailles.

Une pensée pour Lionel, distingué professeur de latin et de grec, pour qui les Anciens n’ont plus aucun secret.

vendredi 22 janvier 2016

Les Vieux fourneaux tome 2: Bonny and Pierrot


Quel plaisir, dès la première page, de retrouver Pierre achetant sa baguette dans la boulangerie de son quartier:" Oui, vous voulez quoi? La Sarmentine? La Fleurimeuline du Papé ou... la Grand Siècle à la farine de meule?". "Filez-moi deux pains aux raisins, finalement."
Ça y est, le ton est donné...
Que dire de ce nouvel album?
Pierrot et la bande d'anarchistes malvoyants (ni yeux, ni maître) sont là pour surveiller les dérapages de la "finance carnassière" et sont prêts à commettre leurs "attentats gériatriques" dont je vous passe les détails. Mais les souvenirs de jeunesse et notamment d'Ann Bonny avec laquelle Pierrot braquait les bureaux de Poste plongent ce dernier dans une dépression insondable. Heureusement, c'est sans compter sur l'intervention musclée de Sophie et le retour imprévu de Mimile qui veut raconter l'histoire de la fin du monde- qu'il a vécue personnellement dit-il- à l'aide des marionnettes de Sophie. Irrévérencieux, corrosif, mordant, jubilatoire et si tendre... Encore meilleur que le premier! Qu'est ce qu'on les aime nos vieux fourneaux!


mercredi 20 janvier 2016

Deux étrangers de Emilie Frèche


Cela fait sept ans qu'Elise, mariée, deux enfants, n'a pas revu son père.
Et puis, un jour, il téléphone de Marrakech, il a des choses à lui dire, elle doit venir.
La jeune femme est saisie: ce père, despote violent, a ruiné sa famille et son enfance. Il l'a humiliée, réduite en bouillie et a eu sur elle une emprise telle qu'elle rêvait de le transpercer d'un pic à glace.
Et pourtant, elle part, comme étrangère à elle-même, dans la vieille Renault 5 "vert-bouteille-intérieur-vert-absinthe", dernier souvenir de sa mère morte et cocon dans lequel elle se love et roule tout droit, vers le sud, écoutant des flashs infos sur le Printemps arabe, échos lointains de sa propre volonté de se libérer du joug du tyran.
Dans une longue et lente introspection qui suit le rythme chaotique de l'antique et poussif véhicule, elle replonge dans son enfance, analyse son passé et chemine en elle et sur les routes, lentement, douloureusement. Elle s'interroge sur ce qui a détruit l'amour entre sa mère, jeune Polonaise ashkénaze et son père, séfarade d'Afrique du Nord. Comment cet homme est-il devenu un étranger au sein même de sa famille?
Lorsque, parvenue à Cordoue, elle a soudain la tentation de faire demi-tour, Simon, son mari, l'invite à poursuivre sa route jusqu'au bout:"... nous pourrions être des centaines à t'aimer que cela ne suffirait toujours pas. C'est le sien qu'il te faut."
Ce livre nous invite ainsi à une réflexion sur nos origines, notre identité, le poids de ce qui nous est transmis- que nous le voulions ou non-, l'impact de l'Histoire sur notre histoire. Comment ce père aurait-il pu assumer son rôle de père lui qui n'en a pas eu? Comment peut-on ne pas s'exiler lorsque nos ancêtres ont vécu l'errance: "Sefarade peut aussi venir de l'arabe, safar, qui veut dire voyage." découvre éberluée la narratrice lors de son périple. Tiens, elle aussi, sur les routes...
Un récit touchant sur l'identité et la terrible nécessité d'être aimé... "car la vie est ainsi faite qu'on ne peut pas se passer d'aimer et d'être aimé." François Truffaut, L'Argent de poche.

lundi 18 janvier 2016

Les échoués de Pascal Manoukian


Pour que derrière des statistiques, émergent des visages d'hommes, de femmes, d'enfants...
Ces échoués, ce sont Virgil qui vient de Torjeuci en Moldavie, Assan et sa fille Iman qui ont fui Mogadiscio en Somalie et Chanchal qui a quitté le Bangladesh: tous trois ont échoué à ... Villeneuve le Roi, Val de Marne.
Pascal Manoukian nous livre le récit inimaginable de ce qu'ils ont vécu dans leur pays, sur le trajet qui les a menés en France et de leur survie au quotidien. Inimaginable car d'une violence ahurissante, impensable, absolument innommable: je fus en effet sans voix à la lecture de ce que ces gens subissent.
Pour Virgil, la Moldavie, ce sont des années de communisme qui ont laissé le pays exsangue, affamé, endetté, sans route, sans hommes "partis jouer les bêtes de somme sur les chantiers d'Europe". Il ne reste que des mères qui "vendent les reins de leurs enfants pour survivre" et la mafia qui boit du champagne.
Mogadiscio, après la chute du général Siyaad Barre "n'avait plus ni Dieu ni maître": les pillards et les violeurs sèment la terreur. Des bandes de gamins armés de kalachnikovs et drogués tirent sur tout ce qui bouge.
Enfin, Dacca au Bangladesh est un lieu où règne une pauvreté insondable à laquelle il faut ajouter des cyclones à répétition qui balayent tout sur leur passage et qui font jusqu'à cinq mille morts.
Donc, il faut partir, tenter sa chance, si l'on peut dire, ailleurs, essayer de survivre.
La route, c'est huit mille kilomètres, un an de marche pour Assan et les autres, une pure souffrance car l'on risque à tout moment d'étouffer, de se noyer, de mourir de faim, de soif, d'être violé, assassiné, volé, dévoré.
Puis, l'arrivée: un trou dans la forêt de Sénart pour dormir, un travail d'esclave sous-payé et parfois même non payé, des coups et la nécessité de se cacher encore et toujours, parce que comme le dit l'un de ces migrants:" Ce qu'il y a de pire chez vous est encore mieux que ce qu'il y a de meilleur chez nous."
Je n'oublierai jamais ces personnages: Virgil, Assan, Aman, Chanchal et les autres: Violetta, les effeuilleurs de roses et ceux dont on ne parle pas, qui sont partis un jour sur les routes pour ne jamais arriver.





Merci à Céline et Olivier de m'avoir permis de découvrir ces personnages...

dimanche 17 janvier 2016

La pluie, avant qu'elle tombe de Jonathan Coe

 Rosamond est âgée, elle vient de mourir mais elle a laissé des enregistrements et vingt photographies pour tenter de raconter l'histoire de sa famille.
Chaque chapitre du livre laisse entendre la voix de la vieille femme qui, à la veille de sa mort, prend une à une ces photos qui résument sa vie et les décrit dans le détail : en effet, elle destine ses paroles à Imogen, la petite-fille de sa cousine Béatrix qui est aveugle. Sont alors évoquées les personnes que l’on voit sur les vieilles photos et que Rosamond a parfois du mal à identifier. Elle analyse leur pose, leur sourire, leur visage crispé, essaie de saisir ce que les uns cherchent à montrer, les autres à dissimuler. Elle revoit les bâtiments, les lumières, la nature, les animaux. Chaque photo donne lieu à l'évocation de multiples souvenirs : la mémoire s’emballe, l'écheveau se dévide lentement et parfois douloureusement. Les non-dits, les violences, l’amour non partagé, les haines, les souffrances refont surface. La voix de Rosamond devient plus grave et la tension narrative palpable: quelle révélation s'apprête enfin à éclore? Qu'est devenue Imongen ? Quels liens avait-elle avec cette enfant devenue jeune fille ?
Ce sont ainsi les relations entre trois générations de femmes dans l'Angleterre de 1940 à nos jours qui nous sont révélées: les souffrances des unes, à un âge où l'on doit être aimé et protégé, les mauvais mariages des autres, les séparations, les souffrances et la mort.
Je me suis laissée emporter par ce long monologue intime, par cette voix sensible qui tente d'expliquer ce que l'on est devenu par le passé qui nous a forgés, par les êtres que nous avons rencontrés et que nous avons aimés.
Lorsque j'ai fermé le livre, j'ai compris que j'entendrais encore longtemps la voix de Rosamond et que je n'oublierais jamais ce qu'elle fut...




Merci Béné et Sophie pour cette très belle lecture.

Les Vieux fourneaux I. Ceux qui restent

Dans son jardin, Sophie, très enceinte, repeint tranquillement un vieux théâtre de marionnettes. Elle regarde sa montre, file sous la douche et monte dans une vieille fourgonnette rouge customisée: " Théâtre du loup en slip".
Le vieux Pierrot, dans son appart parisien sous les toits, aux murs recouverts d'affiches militantes ("Que qui peut puisse"!), enfile un costume tout neuf et monte dans sa voiture criblée de fientes de pigeons. Il s'arrête en trombe devant la maison de retraite de Mimile qui met vite fait son costume à carreaux d'avant guerre et place son pain complet dans un petit sachet en plastique "pour ne pas le laisser perdre"...
Tout ce beau monde se rend... aux obsèques de Lucette, la femme de leur pote Antoine et grand-mère de Sophie. Les trois compères aux cheveux blancs et au lourd passé syndicaliste se retrouvent et en profitent pour reparler du temps où ils travaillaient dans l'usine pharmaceutique Garan-Servier. D'ailleurs, la Lucette et le Pierrot, licenciés chacun leur tour, avaient dû se reconvertir.
Mais la Lucette n'est plus... elle a cependant laissé une lettre qui ne doit être ouverte qu'après sa mort et Antoine demande à ses potes de rester un peu et de l'accompagner chez le notaire... où il va découvrir que...
Un pur délice que cette BD qu'il faut lire et relire tellement elle fourmille de détails! Les vieux croûtons ont de beaux restes, pas mal d'énergie et des idées bien arrêtées plein la tête sur la société, l'engagement, l'amour, l'amitié.
Des personnages très attachants, avec lesquels on prendrait bien l'apéro et que l'on a hâte de retrouver sitôt l'album fermé!



Merci Julie pour ce conseil de lecture!

Une pensée pour Daniel et Martine...

samedi 16 janvier 2016

La clef sous la porte de Pascale Garnier

Ils sont quatre, quatre à en avoir leur claque. De quoi? De tout!
Auguste, prof, la cinquantaine, est attendu par ses parents qui quittent à la belle saison leur appart douillet de Cogolin pour leur maison de Laragne. Alors, Auguste y va. C'est comme ça. Ça fait des années que ça dure, mais bon... il n'est pas marié, n'a pas d'enfant. Il est disponible donc.
Ferdinand vit avec Martine qui retrouve une seconde jeunesse dans les bras de Jean-Pierre Robert, le patron du Super U à la gourmette d'or, et avec Carla son ado-ado qui fait la gueule en ne quittant pas des yeux son portable. Et c'est dur!
Agnès, perchée dans son 6e sans ascenseur, subit les nuits agitées de son voisin et les appels téléphoniques de ses frères:" Bonjour soeurette" par ci, "Bonjour soeurette" par là. Sa mère se meurt, Agnès doit les rejoindre.
Enfin, José vit derrière sa télé: "Pas de femme. Pas d'ami. Et très peu d'objets." Bien sûr, il repense parfois à Gisèle qu'il avait rencontrée quand il était jeune mais il n'avait pas été capable de décrocher un mot pour la séduire. Alors, elle était partie.
J'ai beaucoup aimé ce livre qui parle des gens, comme vous et moi (ah bon, chez vous, c'est mieux, tant mieux!) Je me suis attachée à ces personnages si humains, si désespérés et qui, un jour...
J'ai beaucoup ri aussi, je me suis amusée de toutes ces citations cachées dans le texte, de cette librairie Polycarpe "déserte comme il se doit", des lauriers qui ornent la maison du bon Dieu, des tourtons au clodo, des cadenas du Pont des Arts, des Noces harmoniques de l'Oasis de Cucuron, de la chorale des seniors de Montfavet invitée à chanter gratuitement pour les clients du Super U...
De l'humain, toujours de l'humain, encore de l'humain... alors j'aime!

D'après une histoire vraie de Delphine de Vigan

Bon, cette critique ne va pas être facile pour moi tellement j'ai aimé ce livre...
Par quoi commencer?
Tout d'abord, niveau 1 et ultra personnel, je me suis sentie très proche de l'auteur que je ne connaissais pas du tout, enfin seulement de nom et que je n'avais pas l'intention de lire. J'ai donc emprunté ce livre un peu par hasard à la bibliothèque et j'avoue que je ne m'attendais à rien de terrible.
Et là, ouf, le coup de poing dans le ventre. J'avais parfois l'impression de me retrouver complètement dans tout ce qui était écrit: les sensations, les réflexions, les références... J'ai très vite élucidé une partie du mystère: Delphine de Vigan a mon âge, a vécu dans les mêmes villes que moi et a fait les mêmes études... de quoi nous rapprocher, effectivement!
Puis, niveau 2, j'ai été happée par l'histoire, le thriller psychologique: jusqu'où va-t-on aller, va-t-elle enfin se rendre compte qu'elle est littéralement en train de se faire vampiriser? Car, oui, dans ma précipitation, j'ai oublié de vous parler du sujet: Delphine, l'auteur (?), romancière à succès, traverse une phase de doute: suis-je encore capable d'écrire et d'écrire QUOI ? Au cours d'une soirée, elle rencontre L. une femme qui semble être son double (non, non, ce n'est pas moi, je vous le promets!) et qui s'intéresse de très près à son futur livre. Mais pour elle, ce n'est pas une simple interrogation, ça semble être complètement essentiel, pour ne pas dire existentiel...
Je n'en dis pas plus mais franchement, ça marche, quelle angoisse à certains moments, quelle impression de malaise. Le piège- si piège il y a- se refermera-t-il sur Delphine qui se met à ne plus pouvoir vivre sans sa nouvelle amie, cette nouvelle amie qui si gentiment la remplace pour tout et partout?
Niveau 3: qui est L? Personne ne la voit, personne ne l'a vue. Un double d'elle (Delphine) ou elle (Delphine)? Elle face à elle-même? Un auteur face à ses doutes de romancière, qui veut se lancer dans la fiction tout en sachant que le réel est plus fort, qu'il dépasse la fiction et qu'elle est donc obligée de s'y soumettre...
Niveau 4: ce livre est une réflexion sur la littérature. Je cite:"D'ailleurs, ce pourrait être un projet littéraire, écrire un livre entier qui se donnerait à lire comme une histoire vraie, un livre soi-disant inspiré de faits réels, mais dont tout, ou presque, serait inventé". La vengeance de la fiction sur le réel. C'est la preuve que Delphine avait raison parce que, arrivé à la dernière page, on s'interroge: vrai, pas vrai? Même si le réel: p 447 "ça gondole, ça frise, ça frouille" et ça finit forcément sous la plume de l'auteur par devenir fiction, on perd nos repères et c'est ce que l'on aime dans la littérature: que le doute s'insinue, que le réel s'invente et que la fiction devienne réalité. Que l'on me laisse perdue entre deux et que je ne puisse me raccrocher à aucun des deux bords...
Et puis, niveau 5, l'astérisque sur le mot fin... juste la cerise sur le gâteau...
Jusqu'au bout, BRAVO pour ce roman vertigineux et complètement envoûtant. 

vendredi 15 janvier 2016

Dernier désir de Olivier Bordaçarre

Dernier désir de Olivier Bordaçarre


Attention, livre exceptionnel, envoûtant, génial et que l'on ne risque pas d'oublier!
Mina et Jonathan Martin habitent avec leur fils une modeste maison d'éclusier le long du canal de Berry. Ils mènent une petite vie tranquille jusqu'au jour où un nouveau voisin se présente: tiens, bizarre, lui aussi s'appelle Martin. 
Étrange coïncidence, non?
Ce nouveau voisin est très agréable: il est riche et fait de somptueux cadeaux, il a de l'esprit et des bonnes manières... bref, un super voisin... sauf que... son comportement est étrange: il achète la même voiture que Jonathan (et ce n'est pas simple parce que ce n'est pas un modèle récent!), décore sa maison à l'identique...
Finalement, qui est ce nouveau voisin, où veut-il en venir, est-il tout à fait sain d'esprit et quel sera son dernier désir?
C'est un roman très angoissant car ce voisin est très mystérieux, très inquiétant et si Jonathan se pose des questions, sa femme est totalement séduite par cet homme somme toute peu ordinaire...
Le suspens est total...
A lire absolument!

dimanche 10 janvier 2016

La Maladroite de Alexandre Seurat

La maladroiteLa maladroite de Alexandre Seurat
Pour les retardataires...comme moi: un livre à lire de toute urgence: La Maladroite d'Alexandre Seurat
Cette "maladroite", c'est la petite Diana, l'enfant non désirée qui ne sera jamais aimée. Tous les gens qui l'ont côtoyée un jour prennent la parole chacun leur tour, tel un choeur antique, pour dire ce qu'ils ont vu- ou refusé de voir- entendu ou cru entendre et parfois oublié aussitôt.
Ils sont la grand-mère, la tante, l'institutrice, la directrice d'école, le gendarme, le médecin scolaire et les autres, tous les autres. Ils parleront d'elle, diront tout ce qu'ils ont fait ou non pour la sauver, pour la tirer de cet enfer tragique où elle s'enfonce inexorablement depuis sa naissance...
En vain. La machine administrative est lourde, lente, parfois aveugle et sourde alors qu'il faut faire vite, très vite...
Un livre sobre, puissant, violent que vous lirez d'une seule traite. Inoubliable.

Vernon Subutex de Virginie Despentes

Vernon Subutex, tome 1

Vernon Subutex, ancien disquaire d'une cinquantaine d'années, n'a plus rien: ni logement, ni argent, ni amis. Les belles années rock n' roll sont passées, certains copains ne sont plus de ce monde, d'autres se sont rangés.... C'est la désillusion. Cherchant un lieu d'hébergement chez d'anciens amis retrouvés grâce aux réseaux sociaux, Vernon nous fait découvrir ce que sont devenus les uns et les autres, les potes d'autrefois, ceux avec lesquels ils faisaient la bringue, la vraie. Grosse nostalgie de ces temps révolus... 
Chaque nouvelle rencontre nous vaut un portrait très amer, sans concession de ce que sont ses amis devenus et de la société déboussolée, sans idéal ni repères dans laquelle ces dits amis tentent d'évoluer tant bien que mal.
Ce qui m'a amusée au début, sur environ une cinquantaine de pages, m'a très vite ennuyée: bien sûr, on découvre tous ces gens issus de milieux très différents, on se laisse emporter par ces analyses sociologiques menées, il est vrai, dans un style vif, incisif et violent mais, on se perd dans tous ces personnages- marionnettes que l'on devine être plus ou moins des prétextes à des propos au vitriol sur la société et l'on sombre doucement et sûrement dans la caricature. Je pense que le texte aurait gagné de la force en limitant le nombre de personnages et en approfondissant leur analyse psychologique. On aurait pu s'attacher à eux, ce qui n'est vraiment pas le cas!
Et puis, il n'y a pas d'histoire. Tout cela sent un peu le procédé.
Non, je ne suis pas plus emballée que ça et je n'aurai pas la curiosité de me plonger dans le second tome.

Les Loups à leur porte de Jérémy Fel


Les Loups à leur porte

Ce roman se présente comme une série de nouvelles qui sont en réalité trois ou quatre histoires dont on aurait mélangé les épisodes. Donc, rien de franchement original dans la construction.
Le contenu? le fil conducteur est visiblement le mal, sous toutes ses formes, et, à ce titre, l'auteur nous inflige des descriptions abjectes de meurtres en tous genres, viols, décapitations, enlèvements, tortures, anthropophagie... bref, beaucoup de violence, du sang à gogo pour aboutir à rien: aucune réflexion, aucune analyse, aucune profondeur. D'ailleurs, les personnages n'ont pas vraiment d'épaisseur psychologique et les situations sont hautement improbables. 
Je me demande encore quel est le propos de ce livre et trouve étonnant de le voir publié dans cette collection!
Quant à l'écriture, on n'est pas loin du désastre! Certaines tournures sont même franchement incorrectes!
Bref, des longueurs, des clichés et beaucoup de platitudes...

Sur la plage de Chesil de Ian Mc Ewan



Sur la plage de ChesilSur la plage de Chesil de Ian McEwan

Unité de lieu, unité de temps, unité d'action... effectivement, nous sommes, d'une certaine façon, dans une tragédie: celle d"Eward Mayhew et de Florence Ponting, deux jeunes mariés, qui se retrouvent tous les deux seuls, face à face, pour leur lune de miel.

Ils dînent silencieusement sur le petit balcon de leur chambre, face à la mer. Ils n'ont pas très faim, aimeraient mieux aller marcher sur la plage et finalement, ne savent pas trop quoi se dire. Ils ont peur, n'osent pas et finissent par écouter les voix qui s'échappent d'un poste de télévision. La soirée se poursuit ainsi: elle aime le regarder et lui sourire mais l'idée qu'il va falloir se trouver nue face à lui et avoir un rapport sexuel avec son mari la plonge dans une angoisse incommensurable. Quant à lui, il craint d'aller trop vite, de tout gâcher.... Toutes leurs émotions, leurs sensations sont décrites avec beaucoup de minutie. On finit d'ailleurs par bien les connaître grâce à de nombreux flashbacks qui nous révèlent leur milieu social, les études qu'ils ont suivies, leur goûts respectifs. On comprend ce qu'ils sont devenus et l'on a de la peine de les voir souffrir ainsi. Un magnifique roman de l'intimité et du non dit...