Éditions Gallimard
traduit du norvégien par H. Hervieu
★★★★☆
Hasard
des lectures : tandis que je venais de terminer le dernier roman
de Menegaux, les lignes suivantes me donnaient l'étrange impression
de me replonger dans la même problématique : « Sous
la pression, on pouvait être amené à tirer des conclusions
hâtives. Les enquêteurs se formaient leur propre avis dès que les
premières preuves apparaissaient et ensuite, leur
opinion faite, il s'instaurait un processus inconscient pour en
chercher la confirmation. Ils se mettaient des oeillères
et ne recueillaient que les infos qui allaient dans le sens de
leur hypothèse principale. » Celles et ceux qui auront lu
Est-ce ainsi que les hommes jugent ? reconnaîtront
le thème central du roman, à savoir que personne n'est à l'abri
d'une erreur judiciaire tout simplement parce que la pression que
subissent les policiers est telle qu'ils risquent à tout moment de
suivre, tels des « chiens de chasse », la première
piste qui se présente à eux, oubliant les axes secondaires et
risquant de faire endosser la culpabilité à un innocent. Rien que
ça !
Dans
le roman qui nous occupe, William Wisting, policier expérimenté (31
ans de métier!) et reconnu pour ses compétences et son intégrité,
est suspendu de ses fonctions : en effet, il est accusé
d'avoir, dix-sept ans auparavant, fabriqué des preuves pour que soit
arrêté un certain Rudolf Haglund, soupçonné d'avoir enlevé et
assassiné une jeune fille nommée Cécilia Linde.
William
Wisting a-t-il en effet succombé à la tentation de falsifier des
preuves pour que celui dont il avait -et a toujours d'ailleurs-
l'intime conviction qu'il était coupable se retrouve effectivement
derrière les barreaux? Ce qui signifierait qu'un innocent est resté
de nombreuses années en prison - fait gravissime !
Wisting
clame son innocence. Dit-il la vérité, se ment-il à lui même ?
Ou bien quelqu'un a-t-il intérêt à ce qu'il soit destitué, et si
oui, pour quelle raison ?
En
tout cas, il doit rendre sa carte de police tandis qu'une commission
de révision réétudie sérieusement le cas Rudolf Haglund. Wisting
doit maintenant se battre pour prouver son innocence, d'autant que
l'opinion publique, via la presse, s'est déjà fait son opinion…
Pas franchement agréable de voir son portrait à la une tous les
matins… on a comme l'impression d'être mis au pilori !
Destitué
et n'ayant donc plus accès aux anciens dossiers, Wisting ne peut
mener l'enquête librement… Qu'à cela ne tienne ! Sa fille,
Line, journaliste au Verdens Gang est là pour l'aider et le
moins que l'on puisse dire, c'est qu'elle n'a ni froid aux yeux ni
les deux pieds dans le même sabot ! Elle couvre de son côté
un autre meurtre mais se rendra disponible pour secourir son père
dans la tourmente !
Un
bon polar, bien rythmé (les chapitres sont courts), plein de
rebondissements (plusieurs affaires sont mêlées), qui interroge sur
les risques d'erreurs judiciaires auxquelles sont confrontés les
policiers écrasés par une pression médiatique et hiérarchique intense les transformant en « chiens de chasse »
prêts à tout pour faire inculper celui que leur instinct désigne
comme coupable, au risque de ne pas étudier d'autres pistes et de
passer à côté de la vérité.
Des
analyses psychologiques fouillées rendent les personnages à la fois
crédibles et attachants. Je les retrouverais d'ailleurs avec plaisir
dans un prochain roman !
Beaucoup
de suspense et de tension donc dans ce polar nordique où la météo
plutôt frisquette de l'hiver norvégien crée une atmosphère comme
on les aime… dans les livres !
Un
très bon moment de lecture !
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