Éditions Buchet.Chastel
★★★★★
Lors du Festival Étonnants Voyageurs, j'ai surpris Gaëlle Josse
devant un stand, contemplant ce petit livre… Elle s'est penchée
vers la libraire et lui a dit : « Ce texte est une
merveille. »
À peine venait-elle de reposer ledit exemplaire que nous étions deux
indélicates observatrices à nous jeter sur les deux exemplaires qui
restaient : Le petit veilleur (jamais entendu
parler) de Benoît Ress (ah, si ! j'avais lu en 2017 L'Anglais volant publié chez Quidam).
Entre
nous, heureusement que Gaëlle Josse n'en a pas désigné une dizaine
du bout du doigt… je crois bien que j'aurais craqué !
Alors,
ce petit veilleur ? Le conseil de Gaëlle Josse était-il un bon
conseil ?
Oh
que oui ! Et pourquoi n'ai-je pas entendu parler plus tôt de ce
petit bijou ? Parce que ce texte est d'une très grande beauté,
oui, il est fin, sensible, poétique… Il m'a parfois fait penser à
du Duras dans la minutie et la délicatesse des images et des
sentiments évoqués.
Le
roman retrace un parcours en voiture décrit du point de vue d'un
petit garçon nommé Thierry qui, enfoncé dans son siège, ne
perçoit que des bribes du paysage. On ne sait pas qui est l'homme
qui conduit ni où ils vont. On sait seulement que pour l'enfant,
c'est un jour important. Les adultes lui ont expliqué cela. Il n'a
pas bien compris pourquoi.
Au
fil de la route, l'enfant se souvient de son passé, de son
quotidien, évoque une mère souvent absente et qu'il passe son temps
à attendre , soit dans un café, soit seul dans un appartement.
Des images de la pension religieuse où il vit lui reviennent à
l'esprit et notamment une jeune fille qui s'appelle Sophie avec
laquelle il jardine et qu'il écoute jouer du piano.
Ce
petit garçon observe le monde et nourrit son imagination des détails
qui le composent. Souvent, il attend le retour de sa mère qu'il
souhaite ne jamais quitter. Seul, il s'abandonne à la contemplation
de ce qui l'entoure, ce qui donne lieu à des descriptions très
fines et très poétiques qui traduisent merveilleusement la grande
sensibilité de l'enfant. Tout est suggéré dans ce roman où
la parole des adultes, assez rare d'ailleurs, est souvent rejetée
par l'enfant car elle brise l'univers qu'il s'est construit, pour se
protéger certainement.
Le
petit veilleur est un texte court mais sa puissance est telle
qu'il imprime en nous toute la précision et l'acuité du regard de
l'enfant sur le monde qui l'entoure et qu'il tente de déchiffrer…
A l'émerveillement se mêle un sentiment de solitude, d'abandon
peut-être, d'espoir toujours de revoir cette mère qui disparaît si
souvent et si mystérieusement. Benoît Reiss décrit avec beaucoup
de sensibilité l'attente, le vide, le silence, une odeur qui flotte
dans l'air, le bruit des vagues. On est porté par la beauté du
texte, sa poésie, et l'on attend le coeur un peu serré une fin que
l'on redoute un peu.
Superbe !
Cela me fait penser à Modiano. Je note ce titre merci à vous et à Gaëlle Josse.
RépondreSupprimerUn titre choisi par une auteure à son insu, quelle belle histoire. J'ai très envie de le découvrir.
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