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dimanche 16 janvier 2022

Anéantir de Michel Houellebecq

Éditions Flammarion
★★★★☆

 C’est quoi cette eau tiédasse que nous sert Houellebecq avec ce pavé de 730 pages très classe qui se la pète un peu et dont 200 pages de moins n’auraient pas été de refus ? Allez, je fais la fine bouche parce qu’il y a tout de même de beaux passages mais on a sacrément perdu en vigueur : où sont passés sa verve satirique, son mordant, sa causticité ? On l’a connu plus drôle ! Il s’est calmé, notre bonhomme (j’allais dire « rangé » !) Il a mis ses chaussons et son plaid sur les genoux ou quoi ? On avance pépouze, là ! J’espère que ce n’est pas son mariage qui l’a rendu moins décapant ! Bon, on a bien quelques piques ici et là en fin de chapitre mais il faut s’en farcir des longueurs et des longueurs plates comme un trottoir de rue (et qui n’aboutissent finalement pas à grand-chose) avant de retrouver une petite saillie qui nous tire de notre somnolence. Un Houellebecq apaisé, résigné, assagi, voire bienveillant ?

Beurk !

Bon, « comment habiter ce putain de monde » demeure sa problématique essentielle. Trois solutions possibles : Dieu (mais on n’y croit plus) ; la beauté du monde (mais elle n’est pas visible partout) ; et l’amour (il est rarement passionné mais on s’en contentera, hein.) Le sexe, c’est pas mal non plus. Ça permet d’oublier et l’on s’endort mieux après.

Est-ce la fréquentation des grands de ce monde qui l’a ramolli ? Si dans « Sérotonine » le narrateur bien dépressif retrouvait un ami agriculteur dans la Manche qui n’allait pas tarder à se suicider, là, le personnage de Paul Raison, inspecteur du Trésor, 47 ans, travaille à Bercy au Cabinet du Ministre de l’Économie et des Finances (un certain Bruno Juge - alias Le Maire que Houellebecq connaît bien, paraît-il). Lorsque le père de ce Paul tombe malade, il est transféré en EHPAD d’où on le sort rapidement (ouf!) car la sœur de Paul, Cécile, n’a rien d’autre à faire que de s’ occuper de lui (ça tombe plutôt bien!) Elle est dévouée et sait faire de délicieuses tartes aux pommes. Mais sa qualité principale demeure qu’elle croit en Dieu, elle, (quelle chance!) et fermement en plus ! Donc Paul va pouvoir repartir le coeur léger et l’esprit tranquille dans son somptueux duplex avec vue sur le parc de Bercy. Il va retrouver sa femme Prudence dont il s’est, certes, un peu éloigné pendant une petite vingtaine d’années mais dont il découvre sur le tard que les mini-shorts lui font un joli petit cul. Et puis, cette Prudence est une fée de la fellation (belle allitération en f ...) Et plus tard, quand il tombera malade (merde, j’en ai trop dit!), le ministre Bruno J. lui prendra rendez-vous avec les meilleurs cancérologues du monde. Ça aide à vivre tout ça. Évidemment, ça ne résout pas tous les problèmes et l’on meurt quand même. Mais confortablement. (Surtout que Prudence est toujours prête à intervenir ...)

Allez, en vrai, je n’ai pas craché sur le luxueux pavé tout blanc mais franchement, faudrait pas qu’il s’embourgeoise trop, notre Houellebecq. Il risquerait de se perdre...


 

1 commentaire:

  1. Eau tiède. Longueur plate.Le combo chaussons/plaid. Je suis d'accord. Un Houellebecq bienveillant ?... là je ne sais pas, ça ressemble un poil à un oxymore, non ?
    Pour les deux cents pages surnuméraires, je suis toujours d'accord. Je pousserais même jusqu'à une bonne centaine de plus qui n'ont guère d'intérêt sinon aucun.
    Anéantir me semble dans le droit fil des deux précédents romans, Sérotonine et Soumission qui sans m'avoir fait baîller m'avaient un brin ennuyé.
    Je lirai le prochain par automatisme et d'un œil distrait. En espérant ne rien n'en espérer pour éviter une nouvelle fois une déception. Une ça va, trois bonjour les dégâts. Alors quatre n'en parlons pas.
    J'aime bien l'ambiance de vos billets, votre style vivant, joyeux. Si vous avez des commentaires concernant Proust je serais curieux de les lire :)
    Bonne soirée
    Jean

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