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mardi 26 janvier 2016

Celle que vous croyez de Camille Laurens


Il est de certains livres dont on sait, à l'avance, qu'ils vont nous plaire: les sonorités d'un nom peut-être, un titre qui semble vous faire signe, que sais-je... 
En tout cas, je ne me suis pas trompée et je vous promets que lorsque vous aurez parcouru les premières pages de ce livre, le vertige vous prendra car c'est un roman qui vous fait longer un précipice, le précipice des apparences et des faux-semblants.
Lisons tout d'abord la quatrième de couverture: " Vous vous appelez Claire, vous avez quarante-huit ans..." Qui? Moi? La lectrice? Ou quelqu'un d'autre? L'auteur? Un personnage? Des personnages peut-être...? Nous sommes ici au coeur du sujet: l'identité et la question de savoir ce qui nous fait exister aux yeux des autres.
Claire, la narratrice, celle qui a 48 ans, est maître de conférence en littérature comparée. Un peu le genre de personne "qui se demande comment on peut vivre sans avoir lu Proust." Elle est divorcée, a deux enfants et un amant Jo. Or, pour surveiller son amant volage, elle a l'idée de se créer un faux profil Facebook afin d'entrer en contact avec l'ami de l'amant, Chris. 
Ça va, vous me suivez? Tenez-vous bien car c'est beaucoup plus complexe que cela!
 Elle veut, en effet, pouvoir discrètement prendre des nouvelles de son amant, Jo, par l'intermédiaire de Chris, le copain, qu'elle ne connaît pas. Mais, à force d'échanger avec l'ami de l'amant, elle finit par tomber amoureuse... de lui, de celui qu'elle n'a jamais vu et qui pense qu'elle est une belle brune de vingt-quatre ans, célibataire et passionnée de photo! La manipulatrice est prise à son propre piège, le piège de la toile, sans mauvais jeu de mots.   
Mais, allons plus loin encore: et si Claire finissait par être la femme qu'elle s'est créée sur Facebook, pas un double, une autre. Celle qui lui permet encore de séduire, d'attirer, d'exister et d'oublier celle sur qui on ne se retourne plus, celle qui "porte plainte, qui signale sa disparition... car disparaître de son vivant reste une épreuve." Et pourquoi ne la voit-on plus, me direz-vous? Parce qu'elle n'a plus vingt ans: "Hier fantasme, aujourd'hui fantôme." Triste sort que celui de la femme qui vieillit, qui veut jouer encore mais qu'on ne voit plus, qui n'existe plus: "Le problème dans le jeu de cache cache, c'est quand vous restez cachée sans que personne s'en aperçoive." Alors, Claire se "coule dans son personnage avec l'aisance des comédiens." Elle joue, se compose un rôle. Et puis, la voix, c'est important, mais est-ce suffisant? Il faut donc prendre une décision: dire qui on est vraiment. Après tout, l'aspect physique a-t-il tant d'importance? Ou bien, ne pas prendre de risques, s'effacer, se retirer, désactiver son compte et disparaître, quitter la fiction que l'on s'est créée et remettre les pieds sur terre, dans le réel. Et ce peut-être violent, à moins que l'on imagine des échappatoires, par l'écriture, la fiction. Alors, on peut inventer, s'inventer des vies, s'appeler Claire, Camille ou bien Katia...
Comme le dit Virginia Woolf citée p 140: "...il ne s'est rien passé tant qu'on ne l'a pas écrit." Heureusement, il nous reste encore cela...

4 commentaires:

  1. Je suis d'accord avec toi pour dire que certains titres nous envoûtent, et il en va de même des couvertures, d'ailleurs. Il m'est arrivé de choisir des livres dont je n'avais jamais entendu parler sur la seule foi de ces éléments !
    Quant à celui-ci, j'ai bien prévu de le lire. Je trouve le sujet intéressant, et cela fait bien longtemps que je n'ai pas lu de livre de Camille Laurens.

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    1. Merci pour ton commentaire! Je te donne RV samedi prochain sur mon blog... j'aurai une petite surprise concernant ce roman... mais chut!

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  2. Ravie de ce billet, ce livre m'attend juste là, à côté de moi !

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    1. Tu vas te régaler, j'en suis sûre. RV samedi prochain sur mon blog, j'aurai une petite surprise à te faire partager...

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