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dimanche 30 juillet 2017

Le 1 "Nouvelles", hors-série, été 2017



Des nouvelles, encore des nouvelles, toujours des nouvelles… Une passion naissante ?
Oui et non, en réalité, je lis en ce moment un pavé (798 pages) qui me tue les bras et les poignets et qu'il m'est impossible de trimbaler dans tous mes déplacements. Alors, l'envie m'est venue d'acheter un poids plume facile à transporter : c'est Nicole du blog motspourmots qui m'en a donné l'idée ! Il s'agit d'un hors-série du journal « Le 1 » : des nouvelles sur le thème de « l'ailleurs ».
Et ça tombe plutôt bien car l'été, souvent, on va effectivement voir « ailleurs », histoire de se changer les idées, de se reposer, de rencontrer d'autres gens et de rompre avec le train-train quotidien.
Évidemment, ce sujet a retenu mon attention car il faut que je vous avoue une chose : j'ai un mal fou à m'extirper de chez moi. Bien sûr, en théorie, je trouve les voyages intéressants, enrichissants, instructifs et en effet, lorsqu'il m'arrive d'être « ailleurs », je cours dans tous les sens, photographie tout ce qui bouge ou ne bouge pas, cherche à goûter l'inconnu sous toutes ses formes.
Mais voilà, le problème, c'est qu'il faut s'arracher, sortir de son trou, prendre la voiture (embouteillages + chaleur + risques d'accidents), l'avion (beurk, archi beurk, terreur ab-so-lue), le bateau (= mal de mer), le train (c'est encore ce que je supporte le mieux même si j'ai horreur des gares) et sur place… d'autres réjouissances commencent : de nouveau, la chaleur (bon, je n'ai qu'à aller dans le nord, me direz-vous!), les touristes en grand nombre, les moustiques et autres dangers naturels, les vols (oui, les papiers, l'argent…), la fatigue, les péripéties en tous genres, très amusantes à raconter APRÈS mais qui demeurent un calvaire PENDANT.
(Et si en plus vous voyagez avec des enfants, vous passez tout votre temps à chercher des toilettes ou à faire la queue pour acheter des glaces - le bonheur...)
Fondamentalement, je suis très oblomovienne (au fait, avez-vous lu Oblomov de Gontcharov ??? Non ??? Pas possible !!! Un indispensable, incontournable, essentiel chef- d'oeuvre de la littérature russe ! A lire ab-so-lu-ment !)
Donc, je reviens au sujet principal de mon article, ces onze nouvelles sur le thème de l'ailleurs, écrites par de grandes pointures de la littérature contemporaine, avaient tout pour retenir mon attention et c'est avec délice que j'ai lu pour commencer celle de Lydie Salvayre (oh, comme j'aime ce qu'elle écrit !!!) : sa nouvelle s'intitule « Je déteste l'ailleurs », ah, ça commence bien, non ?
« J'ai pour ma part la religion de l'immobilité.
Voici comment je la pratique.
C'est simple. Je me fixe quelque part. Un lit peut faire l'affaire. Ou un fauteuil douillet. Je baisse mes paupières. Et voici que les océans s'ouvrent, que se dressent les monts, que se creusent les vaux, voici que l'Amérique déroule ses tapis et m'accueille, ou le Belize (sans ses moustiques), ou la Chine (sans ses fumées)…
J'ai la religion de l'immobilité. Elle a, entre autres vertus, celle de ne point fatiguer et celle, surtout, de se marier parfaitement avec ma religion de la lecture. Essayez de lire en marchant, ou à bord d'un bateau qui tangue, ou en escaladant une paroi des Alpes, ou en vous extasiant devant les ruines de Pompéi. Vous constaterez que c'est tout à fait impossible. »
Oh comme tout cela me plaît ! Ce n'est pas pour rien que mon blog s'appelle Lire au lit !
Sympa aussi la nouvelle de Véronique Ovaldé qui n'est pas sans points communs avec celle de Lydie Salvayre d'ailleurs, vous verrez !
Et puis, vous trouverez les « beaux récits » : celui de J.M.G. Le Clézio qui met en scène des gamins des rues qui rêvent de passer une frontière pour aller vers un ailleurs plus riche ou celui de Nathacha Appanah : trois hommes, pauvres eux aussi, rêvent le soir sur une jetée d'un avenir meilleur, ailleurs…
Karine Tuil, quant à elle, évoque de façon très touchante la mort de son père trois jours après la parution de son excellent roman L'Insouciance, un homme qui s'en est allé ailleurs : magnifique portrait de père… Un autre très beau portrait, celui de la grand-mère de Valentine Goby qui toute sa vie et pour des raisons bien indépendantes de sa volonté n'a jamais pu vraiment se fixer ; alors, pour elle, l'ailleurs est synonyme d' « arrachement, de mouvement perpétuel et de manque. Il est le contraire d'un «chez soi» - une expression dont la douceur déborde dans sa bouche : elle évoque la chaleur d'un foyer, l'espérance d'un lieu sûr . Ailleurs, c'est nulle part. »
C'est avec beaucoup d'humour aussi et d'autodérision que Tonino Benacquista raconte un retour Melbourne - Bangkok - Amsterdam virant au cauchemar (de toute façon, pour moi, même dans d'excellentes conditions, ce genre de voyage EST un cauchemar!)
Et l'on retrouve avec plaisir le style de Catherine Poulain dans une très belle nouvelle intitulée : La mouche, le chevreuil et le poulain fou.
Pour ma part, j'ai été peut-être un peu moins conquise par les nouvelles d'Erik Orsenna, de Kenneth White et de Metin Arditi mais à vous de vous faire votre avis !
Allez, que cet article ne vous retarde pas et ne vous fasse pas oublier de finir votre valise (ah oui, j'avais oublié une autre de mes saintes horreurs : faire des valises…)
Bon, j'arrête mes lamentations et me replonge dans mon ailleurs actuel : ah oui, j'ai oublié de vous dire que depuis une semaine... je suis à Venise...
Vous connaissez certainement Venise ?
C'est le printemps dans la Venise que j'arpente chaque jour…
Le printemps 1516.
Et l'épais et délicieux pavé qui me conduit à lire des nouvelles quand je me déplace (pas loin, rassurez-vous!) s'intitule Les enfants de Venise de Luca Di Fulvio.
Un sacré voyage !
Dépaysement assuré !

Je ne ramènerai pas de photos mais des images, pour sûr, j'en ai plein la tête !

                                     

mercredi 26 juillet 2017

Le coeur sauvage de Robin MacArthur


Éditions Albin Michel
Terres d'Amérique
traduit de l'américain par F. Camus-Pichon
♦♦♦♦♦ (immense coup de coeur !!!!)

Magnifiques nouvelles, merveilleuses nouvelles, indispensables nouvelles… Et je pèse mes mots ! D'ailleurs je vais vous demander de me croire sur parole car je sens qu'il va m'être difficile de trouver les termes justes pour évoquer toute la beauté, la sensibilité et l'amour que renferment ces nouvelles. Lisez-les et vous verrez, vous allez adorer, c'est sûr  !
De quoi parlent-elles ?
Des lieux, des hommes et des femmes qui y vivent, d'un monde rural, sauvage, situé dans le Nord- Est des États-Unis : le Vermont, petit État très peu peuplé et recouvert essentiellement de forêts… Certains sont restés toute leur vie là où ils sont nés, d'autres sont partis, ont préféré continuer leur existence ailleurs, en quête d'un bonheur ou d'une réussite qu'ils pensaient ne jamais atteindre en restant sur ces terres sauvages.
Mais un jour, ils reviennent. Les parents ont vieilli ou sont morts, les champs étouffent sous les mauvaises herbes, les toits des fermes menacent à tout moment de s'écrouler, les mobil- homes et les cabanes de chasseur prennent l'eau, des bouteilles de bière ou de whisky jonchent le chemin principal et les bois vigoureux ont pris leurs aises.
« Il se passe quoi avec ces champs ? Cette façon qu'ils ont de rendre possibles toutes les directions . D'ouvrir des perspectives aux maisons, aux terrasses, aux voix. Cette façon dont le mot même - « champs »- te donne l'impression d'être à la fois domestiquée et sauvage, mi-loup mi-humain, capable de t'avancer vers cette terrasse avec sa fumée et ses rires, ou bien vers les bois, où tu pourrais tranquillement, sans bruit, commencer à marcher. »
Revenir sur ces terres, c'est retrouver l'enfance, les baignades nus dans les rivières glacées, les odeurs de pins, d'érables et de fougères, les promenades nocturnes dans les forêts mystérieuses où veillent le cerf, le lynx ou le puma, les cris des animaux sauvages.
Alors, soudain, naît le sentiment que si la vie dans ces lieux est difficile, ailleurs elle est peut-être tout simplement impossible. Une question se pose : où se construire ? Ici ou là-bas ? Peut-on être d'ici et vivre là-bas sans souffrir, sans ressentir un manque ?
« Je m'arrête un moment sur cette route, les bras ballants, et je ferme les yeux en me disant que la vie nous offre peut-être plus d'une chance de nous en sortir, ou différentes formes de chance, et je me remets à marcher vers l'endroit où je suis né, celui où trop de mes proches sont morts, et sous cet angle la maison et la grange paraissent curieusement moins solides, moins violentes, moins permanentes, leur semi-ruine laisse entrer une nouvelle sorte de lumière, et les rivières, qui à l'aube ressemblaient à des veines, ont maintenant l'air de rivières charriant leurs eaux froides vers un lieu plus vaste, encore à déterminer, où je me sentirais chez moi. »
Enfin, revenir, c'est surtout, bien sûr, revoir ceux qu'on aime. L'émotion est intense et Robin MacArthur peint de façon extrêmement subtile et délicate ces retours, les silences qui les accompagnent dans l'intimité d'une soirée de fin d'été, le surgissement d'un passé qui soudain affleure, affolant les pensées tellement l'amour est là, fort, puissant, au détour de chaque chemin, à la lisière des grands bois sombres, dans l'air vif des matins frais, dans les rires et les larmes des visages aimés, dans les rides de ceux que l'on n'a pas vus vieillir parce qu'on est parti. Alors, surgit, vaguement, une certaine nostalgie, une forme de culpabilité, même, que l'on noie dans l'alcool et les larmes.
J'aimerais tellement vous en dire plus pour vous persuader de lire ces nouvelles magnifiques dont l'écriture exprime si magistralement toute la complexité des sentiments des personnages, solitaires ou marginaux, un peu paumés, usés par la vie, déchirés par les séparations liées à la perte de l'être aimé ou simplement à son éloignement.
Par définition, une nouvelle est un texte court, concis et pour ma part, je suis toujours un peu frustrée lorsque j'en achève la lecture, mais les textes de Robin MacArthur ont une force, une puissance d'évocation telle qu'en quelques mots, elle bâtit toute une histoire, tout un passé et un avenir, nous rend ses personnages attachants, vivants, terriblement humains dans leur fragilité et leur vulnérabilité.
J'ai achevé la lecture de chacun de ces textes dans un état proche des larmes tellement l'émotion est intense, c'est dire à quel point j'ai été saisie par ces portraits magnifiques.
« Elles ressemblent à quoi les femmes de chez toi? » demande Matthew à Hannah.
« Les femmes de chez moi, en tout cas . Voilà ce que je réponds intérieurement à Matthew. Sauvages. Ridicules. Seules dans leur maison. Un vent frais s'engouffre sous le calicot de ma robe, me lèche les cuisses. Et moi ? A quelle maison j'appartiens ? A quel pré ? Les grillons stridulent de plus belle, partout. Toujours ce même vieux, très vieux chant d'amour. »

Surtout, surtout, ne passez pas à côté de ce petit chef-d'oeuvre !

Je vous propose un lien vers le blog de Robin MacArthur : cliquez ici !

                                   
                              

lundi 24 juillet 2017

Croire au merveilleux de Christophe Ono-Dit-Biot


 Éditions Gallimard
♦♦♦♦♢ (J'ai beaucoup aimé)

J'ai été complètement charmée par le dernier livre de Christophe Ono-Dit-Biot : Croire au merveilleux, un roman solaire, sensuel, mythologique, magique, mystérieux qui m'a littéralement envoûtée. J'en ai aimé la langue simple, pure et la beauté des descriptions des lieux et des corps.
Le narrateur César a perdu sa femme, Paz , qui s'est noyée dans des circonstances qui resteront assez mystérieuses. Il lui reste son petit garçon. Mais malgré tout l'amour qu'il a pour cet enfant, il ne parvient pas à surmonter sa peine et décide de se suicider. « Aujourd'hui je vais mourir. Je ne suis pas malade. Je ne suis pas ruiné. Je n'arrive plus à vivre, c'est tout. Amputé à ce point, est-ce qu'on peut même employer le mot : vivre? » Avalant un à un les cachets qu'il a préparés, il est soudain interrompu par la sonnette de sa porte d'entrée : titubant vaguement, il se décide à ouvrir et découvre une jeune voisine qu'il n'avait jamais rencontrée. Elle s'appelle Nana, a oublié ses clefs et attend son frère. Elle entre dans l'appartement et découvre la collection de Budé que possède le propriétaire des lieux. Elle semble très érudite pour son âge, au grand étonnement de César et elle lui demande si elle peut lui emprunter La Théogonie d'Hésiode. « Un poème du VIIIe siècle avant Jésus-Christ qui raconte la création du monde et les batailles entre les dieux et les monstres, je doute que cela vous serve dans la France d'aujourd'hui » lui fait remarquer le narrateur mais elle repart comme elle est venue, laissant un César un peu perdu, comme arrêté dans son élan : « ce n'est plus le moment propice, le kaïros, comme disaient les Grecs de l'Antiquité pour qualifier cet espace entre le trop tôt et le trop tard. »
Abîmé dans ses pensées, César se dit qu'il a l'intime conviction d'avoir vu ailleurs cette jeune fille énigmatique… Mais où ?
Alors, commence une aventure qui va mener le narrateur (et nous par la même occasion) de Paris à Marina di Praia sur la côte amalfitaine, au site archéologique de Paestum, puis de la Grèce au Japon, toujours vers la lumière, vers une renaissance par l'art, la littérature antique, le merveilleux des contes et de la mythologie, seuls capables de reconstruire les êtres brisés, de les ramener à la vie.
L'auteur, comme un magicien, fait renaître en nous l'enfant que nous étions, émerveillé par les histoires de dieux et de héros, nous rappelant par là même que c'est précisément cette capacité à s'émerveiller qui fait l'adulte que nous sommes, apte à affronter un monde souvent violent, d'y vivre malgré tout, de s'y construire et d'y être heureux.
Et cette faculté est un bien précieux qu'il faut conserver en soi le plus longtemps possible et surtout transmettre à nos enfants afin qu'ils sachent puiser en eux la capacité de surmonter leurs peines en goûtant la beauté qui les entoure.
Un texte qui donnerait presque des ailes pour voler là où la mer et le ciel se confondent, où l'odeur de la menthe, du romarin et du basilic nous enivre, où ne rien faire et rêver sont les seules activités possibles…

Ça vous dit ? Allez, on y va !

dimanche 23 juillet 2017

Haute Voltige d'Ingrid Astier


  Éditions Gallimard
  ♦♦♦♢♢ (J'ai aimé, sans plus)

Décidément, je suis incapable de suivre mon programme de vacances : j'ai craqué pour Haute Voltige le dernier polar d'Ingrid Astier dont j'avais lu de bonnes critiques… Alors, que dire ? Bon, c'est vrai, ce genre de romans n'est pas ma tasse de thé : j'ai eu l'impression d'être plongée tête la première dans un James Bond au rythme effréné, et moi qui suis plutôt du genre Rohmer / Woody Allen, j'avoue que j'ai été un peu secouée et arrachée assez brutalement à ma petite zone de confort ! Mais bon, à ma grande surprise, j'ai fini par me laisser prendre au jeu en acceptant les conventions du genre...
En effet, on en a pour son argent ! De grandes scènes hyper cinématographiques dans des lieux ultra romanesques : toits de Paris la nuit, péniche somptueuse, l'Eendracht, où une femme magnifique en slip brésilien satin mandarine bordé de dentelle noire nage dans un aquarium avec des esturgeons (!), appartement du XVIe avec vue sur la Tour Eiffel, murs placardés de toiles de Basquiat, table basse tripode Jean Royère. et j'en passe !
Les personnages sont de richissimes truands portant Rolex ou IWC Portugieser (entre 5000 et 7000 euros pièce), costumes de marque et pulls cachemire, louant toute une terrasse de café pour pouvoir fumer sans déranger personne, buvant du Dom Pérignon 1993, se déplaçant entourés de gardes du corps, possédant Aston Martin « grise comme un lac à l'heure où blanchit la lumière », BMW ou Mercedes et évidemment, carte Visa Infinite.
J'ai lu que l'auteur avait le souci du « détail vrai » : aucun doute, tout existe, je me suis parfois amusée à vérifier sur la déesse Internet.
Le sujet : le convoi d'un riche saoudien est attaqué dans le tunnel de Saint-Cloud alors qu'il se rend au Bourget. Une attaque haut de gamme selon l'inspecteur Suarez qui va être obligé de se détourner d'une autre affaire qui l'occupe à plein temps : celle du Gecko, surnom qu'il a donné à une espèce d'homme-volant, gentleman cambrioleur des temps modernes, capable de s'introduire où il veut, quand il veut, de préférence par les étages élevés, toits ou fenêtres. La BRB, brigade de répression du banditisme, est sur les dents : ils ont affaire à des gens fortunés, sans scrupules, capables de tout pour obtenir ce qu'ils veulent et ce qu'ils aiment : objets de luxe, œuvres d'art ou femmes si le désir est là.
Bref, on est dans le sensationnel, le grandiose, le spectaculaire… Il faut se laisser aller, s'amuser de découvrir tout un monde inconnu (vous connaissiez, vous, le chessboxing ou le parkour ? Pas moi!) Évidemment, on n'évite pas les clichés liés au genre et une recherche peut-être un peu trop systématique de la formule qui sonne bien mais finalement, encore une fois, on ne boude pas son plaisir et l'on se lance dans l'aventure...

Allez, je vous sers un verre de champagne (du Selosse, bien sûr, cuvée Substance – ça existe, j'ai vérifié !) accompagné de sa petite cuillère de caviar ?

samedi 22 juillet 2017

Selfies de Jussi Adler Olsen


Éditions Albin Michel
traduit du danois par C. Berg
♦♦♦♢♢ (J'ai moyennement aimé)

Peut-être êtes-vous familier du Département V de la police de Copenhague, du commissaire Carl Mørck et de ses acolytes Assad, Rose et Gordon ? Pas moi et je les découvre avec ce nouveau titre Selfies qui correspond à leur septième enquête.
Évidemment, après mes grandes déclarations sur le fait que les polars du nord, très peu pour moi, (voir les épisodes précédents au sujet de Ainsi débute la chasse de David Patsouris), je risque d'être gênée aux entournures si je dois vous annoncer que ce livre qui se passe ... au Danemark a été un gros coup de coeur !
Mais hélas non, ce roman ne m'a pas totalement séduite. Cela dit, je l'ai lu avec plaisir et assez rapidement, suspense oblige, mais certains points m'ont tout de même un peu gênées. Lesquels ? Je sens que je vais me faire des ennemis car visiblement, les romans de Jussi Adler Olsen ont beaucoup, beaucoup de succès ! (Cela dit, je n'ai peut-être pas commencé par le meilleur...) Donc, je me dois de me justifier...
Tout d'abord, parlons des personnages et notamment des policiers du fameux Département V : je les ai trouvés, allez, un peu ternes. (Il faut dire, quand on passe après l'équipe d'Adamsberg, la barre est haute!) Ils n'ont pas le petit truc qui me fait craquer et qui aurait permis de me les rendre attachants et de me donner envie de les retrouver. Peut-être est-ce parce qu'ils sont davantage présentés dans les premières enquêtes. Du coup, quand on commence par la septième, évidemment, on a perdu des éléments d'info ! Cela dit, j'ai apprécié leur humour et leur sens de la répartie. Et puis, dans ce roman, il est accordé un sort particulier à Rose, la secrétaire : ce n'était donc peut-être pas le moment idéal pour rencontrer ce personnage écrasé sous une avalanche de malheurs que j'ai trouvés à peine crédibles d'ailleurs.
Passons à l'intrigue : elle m'a semblé assez peu vraisemblable et encore une fois, je pense que c'est parce qu'il y a « surcharge ». En effet, l'équipe du département V est empêtrée dans cinq affaires, rien de moins, qui comme par hasard sont toutes reliées entre elles ! Rose se trouve même être la voisine de pallier d'une des victimes… Même les enquêteurs semblent s'amuser de cet extraordinaire hasard, c'est dire !
Et puis, encore une fois, je n'aurais jamais dû lire ce roman après un Vargas : on n'y retrouve ni l'écriture, ni l'originalité, ni la folie de la romancière française. (Quelle chauvine je fais!) Dans le fond, ce n'est même pas une histoire de vraisemblance car les intrigues de Vargas ne sont absolument pas vraisemblables (et je l'accepte parfaitement, certainement parce que l'essentiel est ailleurs !) Il y a dans les textes de Vargas un travail sur la langue et une dimension poétique assez rares dans les romans policiers.
Avec tout ça, j'ai oublié de vous parler du sujet : Anne-Line Svendsen, assistante sociale plutôt dépressive, ne supporte plus les jeunes femmes hyper maquillées et hyper fringuées, prêtes à tout pour participer à des émissions de télé-réalité, qui viennent réclamer de l'argent et profiter du système social pour s'offrir des vacances ou s'adonner à des parties de plaisirs. Et elle n'en peut tellement plus qu'elle décide de les supprimer une à une. Découvrant qu'elle a un cancer, elle considère qu'elle n'a rien plus rien à perdre ...
A cela, s'ajoutent quatre autres affaires que je vais vous laisser le plaisir de découvrir sans moi !
Je suis donc un peu déçue par ce premier contact avec l'oeuvre de Jussi Adler Olsen mais je ne dis pas que je ne me replongerai pas un jour dans les sous-sols du département V .

L'été d'ailleurs, on s'y sent bien au frais...

vendredi 14 juillet 2017

La Daronne de Hannelore Cayre


 Éditions Métailié
 ♦♦♦♦♦ (J'ai adoré)

La Daronne par-ci, la Daronne par-là et les « tu l'as lu La Daronne ? », ou les « ah, vous ne connaissez pas La Daronne ? »...
Ok, le livre ne faisait pas partie de mon programme d'été (comme celui que je suis en train de lire d'ailleurs…) mais tant pis, j'ai craqué pour La Daronne et j'ai voulu savoir qui se cachait derrière cette femme planquée derrière des lunettes noires et un fichu, l'imper serré à la taille et deux énormes sacs Tati à ses côtés ! Et, bien m'en a pris ! Car cette daronne vaut le détour ! (D'ailleurs, je crois que c'est l'auteur elle-même qui pose sur la couverture !)
Le sujet : Patience Portefeux est née d'un père pied noir et d'une mère juive : « Mes parents étaient des métèques, des rastaquouères, des étrangers… Comme tous ceux de leur espèce, ils n'avaient pas eu beaucoup le choix. Se précipiter sur n'importe quel argent, accepter n'importe quelles conditions de travail ou alors magouiller à outrance en s'appuyant sur une communauté de gens comme eux ... ils n'avaient pas réfléchi longtemps. »
Patience Portefeux a donc été à bonne école et, à cinquante-trois ans, veuve depuis longtemps, alors qu'elle travaille comme interprète (elle parle arabe couramment) dans les tribunaux ou traduit les échanges des dealers mis sur écoute pour la brigade des stups du 36 quai des Orfèvres, qu'elle gagne trois fois rien au black (= ni sécu ni retraite) et qu'elle doit subvenir seule aux besoins de sa mère placée en E.H.P.A.D (les Éoliades, 3000 euros x 12 !) et laisser un petit héritage à ses filles, elle se dit que si elle parvenait à arrondir ses fins de mois d'une façon ou d'une autre, ça ne serait pas de refus ! Il faut seulement que l'occasion se présente - l'occasion fait le larron - et le moment venu, ne pas hésiter même si l'on risque de franchir la ligne jaune et de devenir une hors-la-loi (et quand on fréquente un flic divorcé, c'est embêtant!) Quant à se transformer en Daronne, il n'y a qu'un pas… Mais, c'est quoi, au fait, une Daronne ? Ah, ah ! Suspense !
Le personnage principal, à la fois femme et mère désespérée (il y a d'ailleurs plusieurs très beaux portraits de femmes dans ce roman), complètement usée par la vie, veut s'en sortir, coûte que coûte : elle n'a plus le choix. Alors, quand elle prend conscience qu'un traducteur juridique « entend tout avant les autres », elle se dit que ces petites choses-là donnent un certain pouvoir... dont il faut savoir profiter ! « Je traduisais ça à l'infini… encore et encore… Tel un cafard bousier. Oui, ce petit insecte robuste de couleur noire qui se sert de ses pattes antérieures pour façonner des boules de merde qu'il déplace en les faisant rouler sur le sol… Eh bien son quotidien minuscule est à peu près aussi passionnant que ce qu'a été le mien pendant presque vingt-cinq ans : il pousse sa boule de merde, la perd, la rattrape, se fait écraser par son fardeau, n'abandonne jamais quels que soient les obstacles et les péripéties rencontrées… Voilà ce qu'a été ma vie professionnelle… et ma vie tout court d'ailleurs puisque j'ai passé mon temps à bosser. »
Allez, vous en aurez pour votre argent car ce livre est d'une drôlerie insensée : c'est une œuvre pleine d'humour (noir), cinglante, incisive, qui place le projecteur sur de réels problèmes de société (légalisation de la drogue, place de la femme, parents âgés à placer….) Tant pis pour la morale et la loi !
Et puis, la langue est là, imagée (ah les échanges entre dealers : du pur jus!), crue, directe, violente, inattendue, insolente, percutante, à l'image d'une femme (auteur et personnage) qui dit les choses comme elle les pense, que ça plaise ou non. Droit au but, cash ! Du frontal.
C'est très « politiquement incorrect » et j'adore ça !
Paraît-il que Hannelore Cayre (avocate pénaliste de métier, c'est dire si elle connaît le sujet!) nous prépare un roman sur la contrefaçon et les Galeries Lafayette…

Je sens qu'on va encore se régaler...

                                   

dimanche 9 juillet 2017

Avant que les ombres s'effacent de Louis-Philippe Dalembert


Éditions Sabine Wespieser
✦✦✦✦✦ (coup de coeur!)

Ah ! Voilà qui commence bien, très bien même, d'abord parce que c'est les vacances et qu'il était temps, grand temps, et puis parce que je viens d'achever un roman, un vrai coup de coeur : Avant que les ombres s'effacent de Louis-Philippe Dalembert.
C'est l'histoire du docteur Ruben Schwarzberg dont on suit l'incroyable parcours, de sa naissance, en 1913, à Lödz en Pologne, sa jeunesse et ses études à Berlin jusqu'à la terrible nuit de Cristal du 9 au 10 novembre 1938, sa découverte du Paris de 1930 et sa vieillesse à Port-au-Prince où il est devenu un médecin réputé. Cet homme originaire d'une famille juive polonaise sera victime du nazisme : avec sa famille, il devra fuir, prendre la route encore et encore afin de trouver un refuge, une terre d'accueil, une seconde patrie.
Nous le suivons à travers ses pérégrinations et si nous ne savions que tout ce qui est raconté a bien existé, nous trouverions tout cela très très romanesque ! En effet, l'on découvre des épisodes incroyables de l'Histoire, notamment, j'en cite un, celui du Saint-Louis, transatlantique allemand sur lequel embarquèrent à Hambourg le 13 mars 1939 plus de neuf cents juifs allemands possédant un visa et à qui Cuba, les États-Unis et le Canada refusèrent l'hospitalité. Obligé de faire demi-tour et donc de repartir vers l'Allemagne au risque de livrer les passagers aux nazis, le commandant Gustav Schroeder, après avoir immobilisé le bateau près des côtes anglaises, menaça d'y mettre le feu afin que soient enfin accueillis les passagers. Cela heurta l'opinion publique et plusieurs pays européens (Pays-Bas, Belgique, GB et France) acceptèrent de recueillir les familles qui se trouvaient depuis 44 jours à bord ! Quand je vous dis que l'Histoire a toujours beaucoup d'imagination !
Donc, disais-je, en écoutant le récit de Ruben Schwarzberg, on découvre aussi (pour ma part, je ne le savais pas!) que l'état haïtien, après avoir voté en 1939 un décret-loi autorisant ses consulats à délivrer des passeports à tous les juifs qui le demanderaient afin qu'ils puissent trouver en Haïti une terre d'accueil, déclare la guerre à l'Allemagne du IIIe Reich, à l'Italie et au Japon le 12 décembre 1941. « Premier pays de l'Histoire contemporaine à avoir aboli les armes à la main l'esclavage sur son sol, le tout jeune état avait décidé lors, pour en finir une bonne fois avec la notion ridicule de race, que les êtres humains étaient tous des nègres, foutre ! Article gravé à la baïonnette au numéro 14 de la Constitution. »
Le docteur Ruben Schwarzberg a 95 ans et, au lendemain du séisme qui a meurtri Haïti en 2010, il se trouve avec sa petite-nièce Deborah qui est venue d'Israël porter secours aux Haïtiens. Assis sur la terrasse, il lui raconte son histoire qu'il n'a jamais racontée à personne, même pas à ses enfants. Il lui dit ce qu'il a vécu tout au long de ce XXe siècle, avant qu'il ne soit trop tard, « avant que les ombres s'effacent ».
Ce roman est à la fois l'histoire d'une saga familiale sur quatre générations et le récit d'un destin, celui d'un homme meurtri par l'Histoire et qui échappa au pire grâce à des rencontres extraordinaires. Les portraits hauts en couleur des membres de sa famille ou des personnages dont il fait la connaissance sont absolument fabuleux. Par ailleurs, l'humour et l'autodérision omniprésents dans le texte ouvrent la voie au sourire, au rire même parfois et offrent toujours une lueur d'espoir, une lumière de réconfort même quand ce sont des événements terribles qui sont narrés. « Tendre », « généreux », « plein d'humanité, de vie, d'amour » sont les mots qui me viennent à l'esprit pour parler de ce roman dont la langue très sensuelle et poétique est un pur bonheur.

Je vous recommande très chaudement ce roman magnifique qui donne une bien belle leçon de vie !

                         
                                                      le Saint-Louis

                                                 
                                                  Gustav Schroeder



lundi 3 juillet 2017

Un brin de verdure de Barbara Pym


Éditions Christian Bourgois
traduit de l'anglais par M. Béquié
✦✦✧✧✧ (J'ai moyennement aimé)

Dans le cadre de l'émission « La Grande Librairie », des professionnels du livre sont interrogés sur leurs coups de coeur : c'est donc sur les conseils d'une libraire de Douais que je me suis lancée dans Un brin de verdure de Barbara Pym…
Eh bien, ce ne fut pas un coup de foudre pour moi, j'avoue même avoir trouvé le temps un peu long ! (D'autres de ses romans sont meilleurs, paraît-il : Quatuor d'automne ou Une demoiselle comme il faut.)
Nous sommes en Angleterre dans un village du West Oxfordshire dans les années 70. Emma Howick, anthropologue, est venue se réfugier dans la maison de campagne de sa mère pour étudier le comportement des gens aux mœurs un peu anciennes.
L'oeuvre s'ouvre sur un dimanche de Pâques où toute une petite troupe s'apprête à faire une promenade dans le parc du château, droit datant du 17e siècle. Le pasteur, Tom Dagnall, figure centrale du village et du roman, pense qu'il se doit d'accueillir Emma et tenter de l'intégrer à la petite communauté.
Veuf, il vit tant bien que mal avec sa sœur Daphné qui ne rêve que d'une chose : partir en Grèce avec son amie. Viendront se joindre à leur promenade dominicale Martin Shrubsole, un jeune médecin, sa femme Avice et quelques villageoises…
Très vite, on est plongé dans une ambiance « à la Tchekhov » : en préparant le thé, en buvant un verre de sherry ou en admirant une très belle composition florale, les personnages s'interrogent sur leur vie, leurs amours, leurs amitiés, la religion, la mort, autrement dit des problèmes plutôt « existentiels » s'il en est, et ce, sur le ton faussement léger du badinage, l'air de rien. Quelques dialogues, non dénués d'humour, font vraiment penser à des répliques de Tchekhov. On y lit une certaine nostalgie pour un passé révolu que certains personnages, assez conservateurs, quittent à regret tandis que d'autres s'élancent avec plaisir dans un monde moderne qui les attire.
Si je n'ai pas trouvé la lecture désagréable, je dois bien avouer que je me suis un peu ennuyée : le roman est assez long et il ne se passe pas grand-chose, ce qui habituellement n'est pas pour me gêner mais là, si quelques trop peu nombreuses répliques tchekhoviennes viennent pimenter un échange entre deux protagonistes, le reste du temps, les discussions sur la façon de faire des bouquets, de décorer l'église, d'organiser les ventes de charité ou les fêtes du village ont fini, à dire vrai, par me lasser. Pour être anglais, c'est très anglais, et pourtant, croyez-moi, j'adore ce qui est anglais mais là, le charme n'a pas vraiment opéré !
En revanche, je me permets de placer là un de mes chouchous du rayon littérature anglaise plutôt légère et drôle : connaissez-vous la série des « Mapp et Lucia » ?
QUOI ? VOUS NE CONNAISSEZ PAS ? VEINARDS !!! A l'époque, (1992, oui oui, j'étais née depuis longtemps, car je ne vous l'ai pas encore dit, mais je suis vieille), c'était publié chez Salvy mais je crois que cet éditeur a mis la clef sous la porte.
J'adorais ces éditions qui mettaient en lumière, entre autres, des auteurs comme Vita Sackville-West , Elizabeth Von Arnim, Barbara Pym et ... Edward Frederic Benson, l'auteur de la série que j'essaie de vous vendre ! UN PUR RÉGAL : le premier tome s'appelle : Queen Lucia, le second: Lucia à Londres, le troisième Miss Mapp ( il y en a six en tout!)
Je ne vais pas vous raconter ma vie mais j'aimais tellement ces romans que des copains anglais, à qui une amie proche et moi-même rendions visite chaque année, avaient fini par nous surnommer Lucia et Mapp tellement ils nous savaient accros aux aventures de ces deux héroïnes. Une petite recherche sur internet m'apprend d'ailleurs que ces romans sont maintenant publiés chez Payot ou bien vous pouvez les trouver en occasion ici ou là.
Vous y lirez une satire de la bourgeoisie provinciale anglaise au lendemain de la Grande Guerre. C'est léger, drôle, piquant, archi archi délicieux, les personnages sont attachants et vous ne pourrez plus les quitter ! Une super série pour les vacances…
Bon, du coup, j'en ai oublié ma Barbara Pym…
Ah, quand le passé refait surface, c'est la petite madeleine…

Je vous la sers avec une tasse de thé et un nuage de lait ?