Éditions Verdier
★★★★☆ (J'ai beaucoup aimé)
Pourquoi
j'ai adoré Bye bye, bird ? Parce que ce livre m'a
rappelé mon séjour chez Linda. Linda ? Oui, ma correspondante
anglaise… Que je vous raconte…
J'ai
14 ans, on est dans les années 80. Ma mère trouve que mon anglais
est déplorable (il ne s'est pas vraiment amélioré depuis!). Elle
me dégotte par je ne sais quelle assoc' une correspondante anglaise.
Elle s'appelle Linda, habite un petit village près de Manchester. On
s'envoie d'abord quelques lettres. On n'a strictement rien à se
dire. Je me souviens seulement que sa formule finale était toujours
la même : « I must go now ». Bref, Linda,
après m'avoir envoyé cinq lignes totalement insignifiantes (ce que
j'écrivais n'avait pas plus de substance, il faut bien
l'admettre...) devait immanquablement partir, quitter le lieu où
elle avait fait un effort surhumain pour m'écrire. Ce « I
must go now », formule toute faite, me faisait à l'avance
détester cette fille que je n'avais pas encore rencontrée… Ça
commençait bien...
A
cette époque-là, comment vous dire… mes goûts allaient vers Nina
Hagen, Sex Pistols, Angelic Upstarts, Clash (the best !), les
tenues qui vont avec et le reste... Pas tout à fait le genre de
Linda…
Ce
séjour linguistique fut une VRAIE catastrophe : le soir même
de mon arrivée, nous nous sommes repliées chacune dans un mutisme
complet qui s'est prolongé jusqu'à la fin du séjour (idéal pour
progresser en anglais!). Je n'adressais la parole qu'à ses camarades
de classe bien plus trash qu'elle et toujours prêts, comme moi, à
faire les quatre cents coups, allais traîner toute seule dans les
ruelles embrumées de son village et ne souhaitais qu'une chose :
me balader sur King's Road repère punk de l'époque. La mère de
Linda finit par nous proposer une journée londonienne et je pus
acheter la teinture rose pour cheveux et la minijupe panthère que je
convoitais depuis quelque temps.
Par
la suite, je n'ai évidemment plus jamais eu de nouvelles de Linda et
mes parents se sont fendus d'une lettre courtoise, cherchant à
compenser par leur amabilité l'attitude déplorable de leur fille !
What a shame !
Alors,
quand j'ai lu l'évocation de ce séjour en Angleterre raconté du
point de vue de Paco Lorca, alter ego de l'auteur, évidemment, j'ai
senti que c'était du vécu : ça sonnait tellement juste !
Comme j'ai ri en lisant ce livre, comme il m'a rappelé de bons (et
de mauvais) souvenirs ! Le récit, très rythmé, très
dynamique, mélangeant anglais, français, paroles de chansons
restitue parfaitement toute l'atmosphère de l'époque : les
années 60. Pour swinguer, ça swingue !
Donc,
le narrateur Paco, 14 ans, débarque le 10 mars 1965 au 47 Land's End
Road à Bristol dans la famille Terry : « c'était une
de ces maisons en brique rouge démultipliées le long de toutes les
rues du Royaume-Uni... »
Dans
la famille Terry, je vous présente : Edward, le père ;
Malcom le corres' ; Peter, le petit frère et, derrière
l'incontournable bow-window du rez-de-chaussée, Pamela, la mère qui
frétille de joie (la pauvre, si elle savait ce qui l'attend…) :
« oh! my god ! Unbelievable ! Welcome to
England ! » hurle-t-elle en frappant dans ses mains
tandis que le père est déjà reparti « lustrer la
carrosserie à l'aide de sa peau de chamois favorite.» So
british… (Cela dit, je crois que c'est aussi l'occupation favorite
de l'un de mes voisins… très, très français !)
Et
l'aventure commence : inénarrable… Ah, les matchs de foot qui
se terminent en baston, les petits déj (haricots rouges, oeuf au
plat, demi-tranche de jambon) « Paco! pas de miettes, my
boy ! » and the cup of tea, of course !, les
magasins estampillés « by appointment to Her Majesty »
(un autre monde l'Angleterre!), les vins d'honneur au collège
Saint-Andrew avec madame Dartilongue, la responsable : tous les
ados affamés se jetant sur les cookies, les so lovely cakes, les
muffins, les tartelettes… « What a disaster ! »
hurle Dartilongue et je ne vous raconte même pas le rock 'n' roll
dans le salon des Terry, la folle partie de cache-cache dans une
maison so british...
Et
puis, c'est l'époque des Mods, de leur groupes fétiches, de leurs
vespas chromées. Fringués p'tits bourges dans leurs costumes
cintrés, ils détestent les rockeurs. Malcom, le correspondant
anglais, est littéralement fasciné par ces types et entraîne le
narrateur dans des concerts endiablées où Paco découvre les
premiers élans amoureux (oh, les seins de Cynthia...), la musique
assourdissante des Who, des Rolling Stones, des Moody Blues, l'alcool
et la drogue…
Je
ne vous dis rien des initiatives du père plutôt autoritaire :
tous à la piscine, et que ça saute ! Et la partie de pêche en
mer avec John (à hurler de rire…)
Franchement,
j'ai passé un excellent moment de lecture : c'est drôle, très
drôle, très vivant, plein d'énergie : c'est simple, on a
l'impression d'y être ! Un vrai roman d'apprentissage : à
n'en pas douter, notre petit Bordelais aura bien profité de son
séjour linguistique et nous, lecteurs, aurons vraiment l'impression
d'avoir vécu la folie des sixties...
N'hésitez
surtout pas, un vrai bonheur !
You
can't believe it !
Je n'ai pas eu la même correspondante anglaise, mais presque la même expérience. Et l’atmosphère musicale que tu évoques me donne vraiment envie ! Merci du conseil ...
RépondreSupprimerJ'ai toujours regretté de n'avoir pas eu de correspondante anglaise, comme la plupart de mes amies de l'époque ( fin des années 60 ). Me voilà - 50 ans après - délivrée de tout remord ! Merci pour ce billet. Et je note le titre en espérant le trouver à la médiathèque.
RépondreSupprimerMerci pour vos commentaires! Lire ce roman permet en effet de vivre par procuration une expérience que l'on n'a pas vécue dans la réalité: n'est-ce pas là un des avantages de la littérature?
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