Éditions Denoël
La Fête est finie
est une comédie à la fois loufoque et grinçante, une belle satire
de notre époque : on rit pour ne pas pleurer, parce que
franchement, il y aurait de quoi se taper la tête contre les murs…
Victor, dit Totor,
physiquement, « ressemblait à Georges le solitaire, la
dernière tortue des Galápagos ». Moralement, « il était
à mi-chemin entre le flan et le potiron. »
Sa passion ? Bach et
reBach : « La grande activité de sa journée, pour ne pas
dire la seule, c’était la préparation de son petit-déjeuner.
Allumer la machine à café, changer le filtre, beurrer les tartines…
c’est là qu’il dépensait ses calories. Ensuite, la journée
était pour ainsi dire finie ; il se collait sur son sofa et en
avant pour le marathon : cantates, motets, oratorios, fugues,
concertos, suites, partitas, préludes, sonates, tout y passait ! »
Et, à la fin de la journée, fourbu, il s’exclamait : « Putain,
c’est trop beau, Bach » : « C’était sa
contribution à la critique musicale. »
L’autre, le narrateur, c’est
Picot et il a perdu son boulot ! Il se voit proposer un job :
garder des camping-cars (tiens, c’est de saison !) à
Lagny-sur-Marne. Très bien ! Il a un chien ? Non mais on
peut compter sur lui, il va en trouver un, même deux à la SPA du
coin et il va même réussir à faire embaucher le Totor. Génial,
hein ?
Et là, tenez-vous bien, ça
démarre sur les chapeaux de roue… Parce que, je ne sais pas si
vous êtes passionné par l’univers du camping-car (allez,
avouez !) mais quand on doit surveiller « l’Hymer ML-I
sur Mercedes, la star du dernier salon de Stuttgart, le premier
intégral léger…Truma Combi 6 pour le chauffage et l’eau chaude,
frigo de 142 litres, marchepied électrique, porte-cellule avec baie,
éclairage intérieur 100% leds, réservoir d’eau propre de 200
litres, panneaux solaires intégrés… », quand on doit
surveiller, disais-je ce genre de véhicule, on peut dire que l’on
a des responsabilités. Oui, c’est le mot !
Alors, quand nos deux
compères, profondément endormis dans les lits ultra confortables de
ce petit bijou sentent que ledit véhicule roule à vive allure vers
une destination inconnue, il y a de quoi paniquer… Heureusement,
leur yorkshire-chien-de-garde, répondant au nom de Bébé-Chips et
Dark Vador, le très très vieux berger allemand noir, sont de la
partie !
Vous n’en saurez pas plus,
cher lecteur, sinon que nos Laurel et Hardy vont faire du camping en
Alsace, rencontrer une fille qui chasse le chevreuil (parce que
l’avenir de l’humanité n’est pas dans les petits pois surgelés
de chez Picard) et un nain habillé en mousquetaire, ils vont devoir
se battre contre les multiples dérives de notre société :
l’implantation d’une décharge industrielle de cinquante hectares
dans une zone de marais où vivent « des dizaines d’espèces
de reptiles, d’amphibiens et d’oiseaux tels le troglodyte mignon
et le roitelet huppé, le plus petit oiseau d’Europe » et
d’un Center Parc de deux cents hectares sur des terres sauvages
d’une beauté incroyable.
Bref, la lutte va être serrée
et sans concessions contre les serial-bétonneurs « qui
détruisent tout, les forêts, le passé, la beauté, le sens de la
vie, la dignité des hommes, mais pleurnichent sur Palmyre plastiqué
par les islamistes », les vrais malades qui « veulent
continuer à danser, à boire, à bouffer, à consommer, à se
balader dans les airs, à faire un aller-retour à Londres pour
acheter une paire de chaussettes Primark, à skier à Gonesse sur une
piste indoor en plein été, à se baigner sous les tropiques
dans les Vosges ! », alors que « deux cents ans de
croissance ont épuisé la planète, ses ressources, son équilibre,
son climat, sa biodiversité, sa flotte, tout. »
Vous l’aurez compris,
derrière la comédie, le propos est bien sérieux ! On a assez
rigolé comme ça, il va falloir se calmer, arrêter « la
grande fête de la croissance, la fête du tourisme, des écrans
plats et de la tour Eiffel illuminée » car oui, la fête est
finie et bien finie !
Pas si léger que ça,
finalement, le dernier livre d’Olivier Maulin !
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