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mardi 1 août 2017

Les Enfants de Venise de Luca di Fulvio


Éditions Slatkine & Cie
traduit de l'italien par F. Brun
★★★★☆ (J'ai beaucoup aimé)

Quel souffle romanesque ! Après Le Gang des rêves, j'imaginais qu'il faudrait bien quelques années à Luca di Fulvio pour écrire un roman à la hauteur du premier, avec la même incroyable puissance d'imagination et le même extraordinaire talent de conteur !
Eh bien non, l'année suivante, il nous sert Les Enfants de Venise : une vraie plongée historique dans un lieu, une époque, une multitude de rebondissements en tous genres et de nombreux personnages hauts en couleur, attachants, parfois terribles, dans tous les cas décrits avec une grande minutie et dont les noms (Scavamorto, Scarabello...) et les attitudes (ingéniosité, ruse, travestissement) nous font inéluctablement penser à la commedia dell' arte dont les premières troupes apparaissaient en ce début du XVIe siècle. C'est tout simplement fabuleux !
Alors si vous êtes prêt à découvrir la Venise du XVIe siècle, ses assassins, ses bandits, ses faux médecins et ses faux prêtres, ses prostituées, ses nobles, ses fanatiques, ses gamins des rues, ses vieux marins, ses couturières, ses tailleurs, si vous souhaitez faire un tour dans ses ruelles les plus sombres où vous risquez à tout moment de vous faire dépouiller ou égorger, si une visite de l'Arsenal vous tente, si découvrir les premiers ghettos vous intéresse, si évoluer dans le Castelletto, le quartier des prostituées malades du « mal français » - la syphilis -, vous attire, allez-y, ouvrez Les Enfants de Venise, vous découvrirez l'extrême pauvreté du petit peuple et la débrouillardise dont il faut user et abuser pour survivre parmi les rats, les puces, les excréments et la boue.
Non, ce n'est pas dans une Venise touristique que vous mettrez les pieds, loin de là d'ailleurs ! C'est une Sérénissime violente, terrible, dangereuse, antisémite, intégriste. Mais il sera aussi question d'amour et d'honneur, d'argent et de larmes, de trahison et de vengeance. Le sang coule à flots à chaque coin de rue, et l'eau de la lagune fait disparaître les cadavres dont on ne sait que faire. Le roman fourmille de détails qui rendent l'évocation des lieux saisissante : on y est ! Les bruits, les odeurs, les couleurs nous assaillent et l'on est comme emporté dans le tourbillon d'un récit finalement très cinématographique.
Dans ce contexte, Mercurio, jeune orphelin romain, comédien aux mille costumes, vit comme il peut dans les égouts. Pour s'en sortir, il vole, aidé de ses acolytes : Benedetta la belle rousse plantureuse, Zolfo et Ercole, une espèce de géant fou. Ayant repéré un marchand juif, Shimon Baruch (un personnage fascinant) qui cache une bourse pleine de pièces d'or, ils vont rapidement le détrousser. Or, ce dernier retrouvera la petite bande et se vengera en tuant Ercole. Mercurio fou de douleur plantera sa lame dans la gorge du marchand, le laissant pour mort. Obligés de fuir, les gamins marcheront vers Venise et rencontreront sur leur route le capitaine Lanzafame qui revient victorieux de la bataille de Marignan (oui oui, Marignan près de Milan, 13 et 14 septembre 1515!). Avec lui, se trouvent Isacco da Negroponte, faux médecin mais vrai soigneur, et sa fille Giuditta. Un échange de regard avec Mercurio et les deux jeunes savent qu'ils s'aimeront à jamais malgré l'adversité qui pèse parfois bien lourd quand elle a pour noms l'opposition d'un père, l'antisémitisme et le fanatisme. Il y a quelque chose de Roméo et Juliette dans cette histoire d'amour impossible entre une jeune fille juive et un garçon chrétien qui se moque éperdument des histoires de religion et n'écoute que son coeur, lui qui ne veut qu'une chose : se battre pour réaliser son rêve, partir vers un Nouveau Monde à peine découvert en emmenant avec lui sa belle Giuditta.
Je ne peux que vous inciter à vous plonger dans cette grande fresque, magnifique roman d'éducation, qui dit combien l'amour donne des ailes et la force de se battre pour enfin être libre.

A ne pas manquer !

2 commentaires:

  1. J'ai été emportée par le souffle romanesque du "Gang des rêves" et il ne fait pas de doute que j'irai aussi à Venise puisque j'aime beaucoup les romans historiques.

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  2. Oui, effectivement Sandrine, si tu as aimé Le Gang des rêves, alors, n'hésite pas, ce volume aussi est fait pour toi !

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