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samedi 4 juin 2016

Retour à Domme de Françoise Houdart


Editions Luce Wilquin


J’ai tellement aimé ma grand-mère que toutes les histoires de grand-mère me font pleurer (je pense notamment à La grand-mère de Jade qui m’avait mise dans un état épouvantable).
Retour à Domme est avant tout l’histoire d’un homme qui, à un moment de sa vie, part à la rencontre de sa grand-mère désormais disparue.
Il se souvient qu’enfant, alors qu’elle lui lisait un livre, il entendit un choc contre la baie vitrée de la véranda : c’était un rouge-gorge, mort. Immédiatement, elle lui mentit : non, il est juste assommé, on va le mettre dans une petite boîte et il va repartir tout seul. L’enfant se réveille après sa sieste, l’oiseau n’est plus là. Regarde, il est retourné dans son nid tout en haut du cerisier, lui dit sa grand-mère Si l’on est attentif, on peut même l’entendre chanter. L’enfant fit semblant de croire aux belles histoires mais il ne fut pas dupe et se cacha pour pleurer…
Et puis, un jour, c’est au tour de la grand-mère de prendre son envol. Avant de mourir, elle raconte à son petit-fils devenu grand qu’autrefois, elle a été une aventurière, une fugueuse, elle avait un amant dans le Périgord, une région qu’elle aime tant. C’était une femme libre. Mais l’amant est mort depuis longtemps et maintenant, c’est son tour à elle d’aller, comme elle le dit, « siffler sur la plus basse branche du cerisier ».
Alors, des années plus tard, quand Oscar reprend conscience sur une petite route de campagne périgourdine, il ne comprend pas ce qui s’est passé. Il semble avoir perdu connaissance, mais pourquoi ? Quel choc a-t-il subi ? A-t-il causé un accident, renversé quelqu’un ?
« Eh ben, Garçon, faudrait quand même bouger d’ici » entend-il, découvrant un vieil homme,   Jeanloup, qui lui propose d’aller boire un café à La Renardière. Encore hébété, il le suit et découvre un hameau au milieu de nulle part, un « trou perdu qui se remplit de vide et de silence ». D’ailleurs, « qui serait assez insensé ou farfelu pour décider de venir vivre ici en totale immersion dans le rien, l’immense, le silence du ciel et des hommes ? »
 Le paysage est merveilleux, le vin n’en parlons pas (Bergerac, Rosette, Pécharmant, Monbazillac…), quant à Emilia et son mari, c’est comme s’ils l’avaient adopté !
Alors, il reste.
Un soir, il leur montre une photo de sa grand-mère. Le paysage, derrière, « c’est Domme ! » s’exclame Jeanloup. Quant à Emilia, elle remarque des vers inscrits au dos de la photo: « Je n’étais qu’un regard parmi ceux des oiseaux dans la paix de la nuit ».
Etrange, il est encore question d’oiseau… Pure coïncidence ? Peut-être pas… Oscar se dit que ce sont des signes, qu’il faut les suivre, ils mèneront bien quelque part, c’est certain…
Mais où cela va-t-il l’entraîner ?
Des fils se tissent entre présent et passé.
Qui était sa grand-mère, cette femme qui a osé mépriser les convenances pour rejoindre l’homme qu’elle aimait, qui s’est envolée vers lui et vers une terre qu’elle admirait et qu’elle avait faite sienne ? Qui l’a connue ? Qui pourrait lui en parler ?
Qui sont Emilia et Jeanloup, ces gens dont il a croisé le chemin, qui l’ont si généreusement accueilli et qui semblent vouloir étouffer leurs souffrances, leurs mystères enfouis ?
Que cachent-ils ?
Et lui, Oscar, qui est-il vraiment ce « solitaire maniaque, cet amoureux occasionnel » qui ne s’attache à personne et meurt à petit feu dans son entreprise de logistique internationale ?
Un très beau texte poétique dans lequel pullulent les « bruyères mauves » et les « vieux prunelliers fourmillant d’insectes assoiffés » et, la nuit, dans «  la parfaite immobilité du monde…, une chouette effraie traverse le silence. » Fermons les yeux et laissons-nous porter…
Alors, comme par magie, les mots de la grand-mère prendront tout leur sens…

Ecoutons-les, ayons confiance et voyons où ils vont nous mener…

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