Éditions Quidam
★★★★☆ (J'ai beaucoup aimé)
Tout
de suite, ce livre a piqué ma curiosité. Très vite, j'ai senti que
le ton léger du départ n'allait pas forcément donner lieu à un
dénouement très heureux. Restait à savoir lequel.
C'est
l'histoire d'une famille, enfin de deux familles et de ce que
racontent les uns et les autres pour arranger une vérité un peu
différente de la réalité. C'est l'histoire de ce que certains ont
vu et de ce que d'autres ont refusé de voir soit parce qu'ils
étaient bien trop jeunes pour saisir le sens de ce qui se passait
sous leurs yeux, soit parce qu'ils savaient qu'ils allaient en
souffrir.
Ah,
ce rapport au réel, à la vérité ! Chacun se débrouille
comme il peut… sauf que parfois, les conséquences de ces petits
arrangements sont bien plus graves que ce qu'on aurait pu imaginer,
si tant est qu'on puisse imaginer quelque chose…
Le
roman débute donc sur la plage de Saint-André-de-Gironde et les
personnages, dont les noms ne seraient pas déplacés dans une
comédie de boulevard, se nomment Messieurs et Mesdames Meunier et
Coquillaud et ils sont accompagnés de leurs enfants respectifs. Tout
ce petit monde se retrouve comme chaque année l'été et tandis que
Monsieur Coquillaud se promène longuement avec Madame Meunier,
Monsieur Meunier s'occupe des gamins, les surveille, leur donne leur
goûter. Quant à Madame Coquillaud, elle reste au logis.
Voilà
à peu près le tableau et j'imagine que vous voyez très bien le
hic. Sauf que, lorsqu'on vit la chose, on n'a pas forcément le recul
nécessaire pour l'analyser. Et c'est bien le problème de Claire, la
fille des Meunier, qui se pose bien deux trois questions mais, pour
le moment, ne va pas plus loin dans ses interrogations. Et c'est bien
dommage, car tout le monde sait que les non-dits, les mensonges ou
les semi-vérités se débrouillent toujours pour creuser
tranquillement leur petit trou dans le fin fond de notre inconscient
et finissent par nous laisser des traces plus profondes que des
tranchées…
Bon,
on peut le dire, les premières lignes sont assez drôles, l'humour
est omniprésent : on frôle la comédie, le vaudeville. Les
personnages, assez caricaturaux dans leur présentation, font
sourire : ils sont tous vaguement ridicules, la palme revenant à
ce Monsieur Georges Coquillaud, chef d'une PME d'assurances qui, sur
la plage de Saint-André-de-Gironde, se proclame « Chef de
tribu africaine » (!), « Père de l'Humanité »
et révolutionnaire ! Rien que ça !
La
mère Meunier, elle aussi, vaut son pesant de cacahuètes : elle
ne s'intéresse « ni à grand-chose ni à grand monde »,
balance les tiroirs mal rangés de sa fille par la fenêtre et
s'enferme dans sa chambre tout le week-end quand elle le juge
nécessaire. Pas plus équilibrée que ça, la mère !
Donc,
le début du roman est assez léger, c'est l'acte I d'une pièce de
théâtre qui n'en est pas une ou d'un roman qui ressemble de plus en
plus à… non, pas à une tragédie… quoique…
Car
effectivement le ton change et la narration très distanciée du
départ devient petit à petit plus personnelle, intime, et l'on
finit par se demander si c'est toujours le même roman qu'on est en
train de lire… Mais je ne vous raconte rien… Suspense !
En
fait, je ne sais pas pourquoi mais je n'ai cessé de penser à
Maupassant en lisant ce texte : cette petite ironie dans la
présentation de ses personnages, le « pas bien grave »
du début, le badin, l'ordinaire qui va déboucher progressivement et
subrepticement sur quelque chose de bien plus sombre, voire de
franchement terrible... Je me suis demandé à plusieurs reprises si
ce roman avait une dimension autobiographique… Qu'importe au
fond...
J'ai
lu ce livre d'une traite et vraiment, il m'a beaucoup plu : on
se passionne pour l'enquête menée par la jeune Claire sur son
passé !
Une
seule petite restriction concernant... le titre ! Un peu
fleur bleue, littérature à l'eau de rose. « Une vie »
aurait été parfait, mais laissons à Maupassant ce qui lui
appartient. (Je me suis amusée à chercher un titre et j'ai trouvé :
« Tout reprendre »… les premiers mots de… Mais bon,
faudra qu'on s'organise une petite soirée pour en discuter...)
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