Éditions Robert Laffont
★★★★☆ (J'ai beaucoup aimé)
Il
était une fois trois femmes, trois sœurs : Hélène qui joue
le rôle de cadette et de narratrice, Émilie, la benjamine et Anne,
l'aînée. Trois sœurs et trois façons d'être au monde. Trois
caractères, trois personnalités, trois tempéraments et une seule
mère ...
Dans
cette famille, à une époque lointaine appelée enfance, Anne
portait du bleu, Hélène du violet, Émilie du marron. C'était la
mère, Édith, qui avait fait ce choix et on ne remettait pas en
question l'autorité de celle qui décidait de tout et voulait tout
contrôler. On obéissait, on se taisait.
Les couleurs
influencent-elles le caractère ? Oui, pense Hélène qui
finalement avec son violet ne s'en était pas trop mal tirée. « Le
bleu d'Anne : un gage de raison, de droiture, le sens des
responsabilités. » Anne, la cinquantaine comme les trois
autres, est effectivement devenue une fille organisée, réfléchie,
qui n'embrasse pas, contient toujours ses émotions.
Émilie, on s'en
doutait, a toujours détesté sa couleur (le marron), elle est
d'ailleurs maintenant persuadée qu'on ne l'a jamais vraiment aimée
(à mon avis, je ne suis pas psy mais le marron doit y être pour
quelque chose...), ni tenue dans les bras : elle est fragile,
pas très sûre d'elle, ultra sensible et pleure pour un rien :
« sa capacité de larmes est très supérieure à la
moyenne ».
Et
puis, il y a Hélène, la narratrice, qui dit ce qu'elle a à dire et
qui a eu elle aussi des moments difficiles (le violet ?), elle qui a
eu besoin qu'un psy lui dise, alors qu'elle n'avait que vingt-huit
ans, « qu'on n'est pas obligé d'aimer sa mère »
ouf, enfin, après cette révélation, elle avait pu vivre et
souffler un peu...
Alors,
le jour où la mère qui distribuait les couleurs disparaît, les
filles se retrouvent. Celle qu'Hélène appelait « sa
connasse de mère » n'est plus, celle qu'Hélène pensait
« increvable » parce que « la méchanceté
conserve » n'existe plus. « Je suis
désarçonnée… de découvrir que l'on peut aimer tout de même
quelqu'un que l'on n'aime pas. » remarque-t-elle
finalement.
Elles
se retrouvent toutes les trois dans l'appartement de la mère, un
lieu où elles mettaient les pieds le moins souvent possible et elles
contemplent ce territoire étranger rempli d'objets choisis
méticuleusement un par un, aimés, chéris, plein de mille et une
choses qui leur rappellent celle qu'elles ont à la fois tant
détestée et tant aimée.
Elles
sont là, un peu paumées parmi tout ça, bras ballants devant ce tri
insurmontable qu'elles doivent faire et sans elle, la mère, dont la
présence se loge dans chaque objet, chaque meuble, chaque tissu.
Elles se retrouvent, resserrent les liens un peu distendus de la
fratrie et soudain, l'enfance resurgit, intacte, entière, ainsi que
le plaisir d'être ensemble, de se retrouver sœurs avant tout, loin
des maris et des enfants.
«…
Nous expérimentons à nouveau l'évidence d'être une
famille, chose étrange, dont on ne sait pas très bien s'arranger
quand si longtemps nous nous en sommes fichues, chacune occupée à
se dépêtrer de l'enfance. »
Chacune
fera son deuil à sa façon, deuil qu'elles revivront bien rapidement
avec la mort du père un an après.
J'ai
beaucoup aimé ce roman, certainement en partie autobiographique, qui
met en évidence toute la complexité des liens familiaux, les
tensions, les haines et surtout tout l'amour qui est là, toujours
présent, même dans les paroles les plus dures, les plus
terrifiantes. Un récit très vivant, émouvant, tendre, joyeux (si,
si!), des personnages attachants et drôles (ah l'humour décapant
d'Hélène la narratrice!)… bref, tout ça est plein d'humanité et
j'adore !
Et
David Bowie dans tout ça ? Ah, il a sa place, vous verrez… et
tant de choses à dire...
Mouais.... Très déçue pour ma part ....je n'ai pas supporté le " ma connasse de mère " des premières pages, cela a mis ma lecture sous cette vulgarité initiale ...un livre "dispensable " à mes yeux en tout cas !
RépondreSupprimerOui, mais parfois ce que l'on dit dépasse ce que l'on pense... Prononcer ces mots, c'est aussi peut-être se protéger d'une réalité difficile à accepter (le fait que la mère soit morte). Dire cela (même si c'est vulgaire, je comprends ta réaction), c'est encore la faire exister, c'est dire les mots que l'on osait prononcer tant qu'elle était vivante. Et puis, il y a tellement d'amour dans ce livre... Si, si
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