Des
nouvelles, encore des nouvelles, toujours des nouvelles… Une
passion naissante ?
Oui
et non, en réalité, je lis en ce moment un pavé (798 pages) qui me
tue les bras et les poignets et qu'il m'est impossible de trimbaler
dans tous mes déplacements. Alors, l'envie m'est venue d'acheter un
poids plume facile à transporter : c'est Nicole du blog motspourmots qui m'en a donné l'idée ! Il
s'agit d'un hors-série du journal « Le 1 » : des
nouvelles sur le thème de « l'ailleurs ».
Et
ça tombe plutôt bien car l'été, souvent, on va effectivement voir
« ailleurs », histoire de se changer les idées, de se
reposer, de rencontrer d'autres gens et de rompre avec le train-train
quotidien.
Évidemment,
ce sujet a retenu mon attention car il faut que je vous avoue une
chose : j'ai un mal fou à m'extirper de chez moi. Bien sûr, en
théorie, je trouve les voyages intéressants, enrichissants,
instructifs et en effet, lorsqu'il m'arrive d'être « ailleurs »,
je cours dans tous les sens, photographie tout ce qui bouge ou ne
bouge pas, cherche à goûter l'inconnu sous toutes ses formes.
Mais
voilà, le problème, c'est qu'il faut s'arracher, sortir de son
trou, prendre la voiture (embouteillages + chaleur + risques
d'accidents), l'avion (beurk, archi beurk, terreur ab-so-lue), le
bateau (= mal de mer), le train (c'est encore ce que je supporte le
mieux même si j'ai horreur des gares) et sur place… d'autres
réjouissances commencent : de nouveau, la chaleur (bon, je n'ai
qu'à aller dans le nord, me direz-vous!), les touristes en grand
nombre, les moustiques et autres dangers naturels, les vols (oui, les
papiers, l'argent…), la fatigue, les péripéties en tous genres,
très amusantes à raconter APRÈS
mais qui demeurent un calvaire PENDANT.
(Et
si en plus vous voyagez avec des enfants, vous passez tout votre
temps à chercher des toilettes ou à faire la queue pour acheter des
glaces - le bonheur...)
Fondamentalement,
je suis très oblomovienne (au fait, avez-vous lu Oblomov
de Gontcharov ??? Non ??? Pas possible !!! Un
indispensable, incontournable, essentiel chef- d'oeuvre de la
littérature russe ! A lire ab-so-lu-ment !)
Donc,
je reviens au sujet principal de mon article, ces onze nouvelles sur
le thème de l'ailleurs, écrites par de grandes pointures de la
littérature contemporaine, avaient tout pour retenir mon attention
et c'est avec délice que j'ai lu pour commencer celle de Lydie
Salvayre (oh, comme j'aime ce qu'elle écrit !!!) : sa nouvelle
s'intitule « Je déteste l'ailleurs », ah, ça commence
bien, non ?
« J'ai
pour ma part la religion de l'immobilité.
Voici
comment je la pratique.
C'est
simple. Je me fixe quelque part. Un lit peut faire l'affaire. Ou un
fauteuil douillet. Je baisse mes paupières. Et voici que les océans
s'ouvrent, que se dressent les monts, que se creusent les vaux, voici
que l'Amérique déroule ses tapis et m'accueille, ou le Belize (sans
ses moustiques), ou la Chine (sans ses fumées)…
J'ai
la religion de l'immobilité. Elle a, entre autres vertus, celle de
ne point fatiguer et celle, surtout, de se marier parfaitement avec
ma religion de la lecture. Essayez de lire en marchant, ou à
bord d'un bateau qui tangue, ou en escaladant une paroi des Alpes, ou
en vous extasiant devant les ruines de Pompéi. Vous constaterez que
c'est tout à fait impossible. »
Oh
comme tout cela me plaît ! Ce n'est pas pour rien que mon blog
s'appelle Lire au lit !
Sympa
aussi la nouvelle de Véronique Ovaldé qui n'est pas sans points
communs avec celle de Lydie Salvayre d'ailleurs, vous verrez !
Et
puis, vous trouverez les « beaux récits » : celui
de J.M.G. Le Clézio qui met en scène des gamins des rues qui rêvent
de passer une frontière pour aller vers un ailleurs plus riche ou
celui de Nathacha Appanah : trois hommes, pauvres eux aussi,
rêvent le soir sur une jetée d'un avenir meilleur, ailleurs…
Karine
Tuil, quant à elle, évoque de façon très touchante la mort de son
père trois jours après la parution de son excellent roman
L'Insouciance, un homme qui s'en est allé ailleurs :
magnifique portrait de père… Un autre très beau portrait, celui
de la grand-mère de Valentine Goby qui toute sa vie et pour des
raisons bien indépendantes de sa volonté n'a jamais pu vraiment se
fixer ; alors, pour elle, l'ailleurs est synonyme d'
« arrachement, de mouvement perpétuel et de manque. Il est
le contraire d'un «chez soi» - une expression dont la douceur
déborde dans sa bouche : elle évoque la chaleur d'un foyer,
l'espérance d'un lieu sûr . Ailleurs, c'est nulle part. »
C'est
avec beaucoup d'humour aussi et d'autodérision que Tonino
Benacquista raconte un retour Melbourne - Bangkok - Amsterdam virant
au cauchemar (de toute façon, pour moi, même dans d'excellentes
conditions, ce genre de voyage EST un cauchemar!)
Et
l'on retrouve avec plaisir le style de Catherine Poulain dans une
très belle nouvelle intitulée : La mouche, le chevreuil et
le poulain fou.
Pour
ma part, j'ai été peut-être un peu moins conquise par les
nouvelles d'Erik Orsenna, de Kenneth White et de Metin Arditi mais à
vous de vous faire votre avis !
Allez,
que cet article ne vous retarde pas et ne vous fasse pas oublier de
finir votre valise (ah oui, j'avais oublié une autre de mes saintes
horreurs : faire des valises…)
Bon,
j'arrête mes lamentations et me replonge dans mon ailleurs actuel :
ah oui, j'ai oublié de vous dire que depuis une semaine... je suis à
Venise...
Vous
connaissez certainement Venise ?
C'est
le printemps dans la Venise que j'arpente chaque jour…
Le
printemps 1516.
Et
l'épais et délicieux pavé qui me conduit à lire des nouvelles
quand je me déplace (pas loin, rassurez-vous!) s'intitule Les
enfants de Venise de Luca Di Fulvio.
Un
sacré voyage !
Dépaysement
assuré !
Je
ne ramènerai pas de photos mais des images, pour sûr, j'en ai plein
la tête !