Éditions du Sous-sol
Je dois dire qu’au début, je n’ai
pas forcément bien pris la chose : Quoi ! Elle fouille dans ses
affaires, lit ses lettres, son courrier, ouvre les boîtes, les valises, observe
ses photos….
Non, vraiment, au début,
l’entreprise ne m’a pas plu…
Et puis, j’ai lu, je n’ai pas pu
m’arrêter et j’ai aimé. Et je me suis dit qu’aimer les autres, s’attacher à eux,
s’intéresser à ce qu’ils ont fait, à ce qu’ils ont été, ça ne pouvait pas leur
faire de mal, au contraire, alors j’ai continué…
Bon, je vous raconte : Clara
Beaudoux, jeune journaliste, s’installe à Paris dans un nouvel appartement.
Nous sommes en juillet 2013. Elle apprend par un courrier publicitaire pour une
mutuelle que l’ancienne locataire s’appelait Madeleine. Elle découvre aussi que
Madeleine est morte un an avant son installation et aurait eu cent ans en 2015.
L’agence lui annonce qu’elle
dispose d’une cave: pleine, fermée à clef et sans clef. Elle a pourtant deux
trois bricoles à y déposer, alors, elle scie le cadenas et découvre… des
caisses, des valises, des objets, un matelas en décomposition.
Elle ne sait pas trop quoi faire
de tout ça. Elle jette quelques vieilles choses qui pourrissent tout en prenant
le soin de les photographier avant de s’en débarrasser.
Pourquoi ? Elle ne sait pas
encore.
Elle prend finalement contact
avec le filleul de la dite Madeleine, seul lien familial de cette femme: que
doit-elle faire de tout cela ? Le jeter à la benne, lui répond-il.
Deux ans plus tard, en 2015, elle
décide d’explorer la cave, dans le détail, et de publier sur Internet, sous
forme de tweets, des photos et des petits commentaires sur ce qu’elle trouve,
ses sentiments, ses interrogations…
Ici un journal, des carnets, une
liste de courses, là une lettre : tiens, qui était Loulou ? et
Martial ?, ailleurs une photo : où est Madeleine ? Je me penche sur
la photo et la cherche, comme l’a fait Clara.
Sur les réseaux sociaux, le
public se passionne pour l’entreprise et des milliers d’internautes aident
Clara à situer les lieux, donnent des précisions sur les dates, testent des
recettes de cuisine, expliquent l’usage que l’on avait de tel ou tel objet
devenu bien mystérieux. Beaucoup se souviennent, d’autres souhaitent témoigner
ou émettre des hypothèses.
Les gens veulent intervenir, font
des suppositions, ont des idées.
L’histoire de Madeleine devient
l’histoire de tout le monde, « l’intime rejoint l’universel »,
l’Histoire et surtout… Madeleine… REVIT, oui, vraiment, une femme
extraordinaire prend forme petit à petit.
Je sens, au fil de ma lecture,
que je m’attache à elle, que je veux en savoir plus, que si j’arrête ma
lecture, elle va me manquer. J’apprends
que la saison 3 est sur Internet. Je me précipite…
Madeleine Project est un très beau portrait de femme, d’une
femme hors du commun (et je ne vous dirai pas pourquoi), que l’on a failli
oublier, qui a failli disparaître et grâce à Clara… (je ne vous ai pas parlé de
Clara mais j’ai tout de suite beaucoup aimé celle qui prenait les photos et
postait ses tweets, toujours avec retenue, respect, générosité, quelqu’un d’une
grande sensibilité…), grâce à Clara disais-je, Madeleine EXISTE, oui, vraiment,
je vous assure ! Il suffit de voir la photo où elle sourit avec un petit
air malicieux pour se dire que si Clara l’avait rencontrée, elles auraient été
amies et elles se seraient certainement bien amusées toutes les deux…
Et, puis, il faut que je vous
avoue encore une chose que Clara ne sait pas encore : Madeleine venait
l’été se reposer… dans la ville où j’habite ! Alors, peut-être, vais-je
proposer à Clara de rechercher… où Madeleine logeait, où elle aimait se
promener, quels étaient ses divertissements, avec qui elle aimait bavarder, sur
quel banc elle aimait s’asseoir…
L’ai-je rencontrée ?
Parfois, cette idée me laisse rêveuse… Oui, c’est fort possible…
Si j’avais su !