Quel début d’année ! Je n’en reviens pas. Les textes que je découvre, quoique portant sur des sujets bien différents, me touchent chacun de leur façon. Pourvu que ça dure !
Je le dis tout de suite, de
Gaëlle Josse, je n’ai pas lu Le dernier gardien d’Ellis Island qui a eu
beaucoup de succès mais je peux vous assurer que ça ne va pas tarder !
Au début du livre, l’éditeur précise que
l’auteur est venu à l’écriture par la poésie. Je crois en effet que Gaëlle
Josse pourrait bien nous parler de n’importe quoi, nous nous laisserions porter
par sa prose si nuancée, si douce, si poétique. La délicatesse faite écriture.
Une prose qui apaise et qui soigne…
Dans L’Ombre de nos nuits,
deux histoires s’entremêlent : celle d’un peintre, Georges de la Tour, en
son atelier de Lunéville, au début de l’année 1639. Dans le clair-obscur de la
pièce, il prépare sa toile et éprouve un « vertige… devant cette surface
vierge. Tout y est possible. » Son petit apprenti Laurent l’observe et
commente chacun de ses gestes. Il fait bon dans l’atelier, les regards se
croisent et se taisent. Chacun contemple ce « Maître qui sait peindre le
silence. » Il sait que sa fille Claude prêtera son visage à Irène, la
jeune femme penchée sur Saint Sébastien et qui tente de lui enlever une flèche
fichée dans la cuisse. Marthe, la fille de la servante, sera celle qui se
dissimule le visage au second plan. Il faut se mettre au travail car le peintre
destine son œuvre au roi, Louis XIII.
Puis, changement d’époque :
nous sommes à Rouen, au printemps 2014 : une jeune femme est face à la
toile peinte par De La Tour : « Saint Sébastien soigné par
Irène », dans un musée de Rouen. Elle aussi a aimé et essayé de soulager,
de soigner celui qui souffrait. Elle se perd dans la contemplation de ce
tableau qui la renvoie à ce passé, encore là, si près, et dont elle panse
encore les plaies.
Lumières, lumières de quelques
moments heureux, intenses, miraculés où l’on a fait don de soi, de son
amour : « Donne toujours plus que tu ne peux reprendre. Et oublie.
Telle est la voie sacrée », ce sont les mots de René Char, cités en
exergue. Don du peintre qui donne de soi pour insuffler la vie aux personnages
sur la toile, don de sa fille Claude qui doit penser, comme le lui demande son
père, à ce qu’elle aime le plus au monde lorsqu’elle pose, don de Laurent, le
petit apprenti orphelin, qui s’est offert secrètement à Claude et se livrera
corps et âme à la peinture, don de la narratrice qui s’est perdue en l’homme
qu’elle aimait.
Ombres, ombres de la guerre,
celle de Trente ans, qui n’en finit pas, de la peste, en cette année 1639,
désolation de voir ce fils aimé qui ne saura jamais peindre, ombres d’un nom
que l’on entend prononcer et qui est celui de l’autre, celle dont l’ombre
plane.
« De l’obscurité émerge une
étrange vérité, celle de nos cœurs. » constate le peintre.
Peut-être a-t-on besoin de
l’ombre de nos nuits pour survivre à la lumière, s’élancer dans le jour qui
nous appelle et « Reprendre la route ».
Ayant beaucoup apprécié Le Dernier Gardien, je pense que je le lirai. Mais j'attendrai de le trouver en bibliothèque...
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